Behemoth

Behemoth au Corona | Au sommet de son art luciférien

A l’instar d’un Iron Maiden du métal extrême, Behemoth a joué l’intégralité de son dernier album, suivi de quelques classiques, avec une mise en scène remarquable, dans une salle comble et dévouée : un groupe à l’apogée de son art.

Quel groupe de black/death métal sur cette planète peut se targuer de :

  • remplir le Théâtre Corona un lundi soir ?
  • jouer son dernier album en intégralité + quelques classiques ?
  • pouvoir faire chanter le public sur certains passages ?
  • jouer 1h30 avec des changements de décors et costumes ?
  • justifier de 25 ans de carrière et d’être au sommet de sa créativité et de sa performance scénique ?

Assurément très peu, mais il est certain qu’on avait la chance d’en admirer un lundi soir : Behemoth. La célèbre horde polonaise était enfin sur le continent américain pour nous présenter l’album The Satanist (déjà sorti en 2014). L’occasion pour les centaines de fidèles présents d’apprécier un groupe dont l’expérience, la force et l’inspiration sont absolument remarquables.

Messe Noire au Corona

Photo prêtée par Thorium.

Photo prêtée par Thorium.

Il est 21h45 quand les lumières s’éteignent et que la bande à Nergal, ovationnée, monte sur la grande scène à son effigie. Presque digne des groupes de rock des années 80 avec la batterie montée sur un immense podium avec des marches de chaque côté, Behemoth n’oublie pas de jouer également avec la technologie moderne avec de superbes effets de lumières et des projections non seulement sur les petits écrans à cet effet, mais aussi sur l’immense bannière de fond de scène. Chaque pied de micro est sculpté, orné de cobras, pentacles et autres motifs occultes.

Le dernier album est ainsi joué dans son intégralité, et l’introduction monte en puissance. « Sing for me Montréal ! » et la foule de hurler « Blow Your Trumpets ! Gabriel ! » Les trompettes de l’ange déchu sonnent le début d’une heure et demie de messe noire métallique, sombre et puissante à souhait. L’expérience fait parler la poudre et Behemoth s’impose maître se son élément dès les premières mesures.

Photo prêtée par Thorium.

Photo prêtée par Thorium.

Le son est fort, écrasant, parfois presque saturé de basses et un peu confus, mais le tout demeure puissant et porte solidement la machine de guerre en action devant nous.  Le titre sombre et torturé Messe Noire confirme l’efficacité du dernier album en concert, mettant en lumière les talents du guitariste Seth. La suite est encore plus prenante avec l’excellent Ora Pro Nobis et ses riffs infernaux qui viennent nous chercher avant qu’un public uni scande « For Thine Is The Kingdom ! ». Les titres relativement plus mid-tempo comme The Satanist et Ben Sahar viendront également nous emporter dans l’univers mystique et religieusement satanique de l’album en question. On aura même droit à une distribution d’osties de la part de Nergal dans les premiers rangs, qui prendront également du sang dans la face un peu plus tard, pour compléter leur bénédiction par les prêtres sataniques polonais. Le molosse de bassiste Orion arpente la scène avec des airs d’un Gene Simmons qui serait ressorti de l’enfer, crachant tout ce qu’il peut de sang et d’eau sur le public qui en redemande.

La finale est remarquable, même si on commence à sentir un peu de longueurs sur les derniers titres, Behemoth nous tient en haleine en s’éclipsant puis revenant sur scène paré d’effrayants masques noirs et cornus pendant In The Abscence Ov Light. « O Father, O Satan, O Sun ». Behemoth achève ainsi l’interprétation de son œuvre la plus récente en concert, dans une performance presque majestueuse.

Photo prêtée par Thorium.

Photo prêtée par Thorium.

Le coup de grâce en classiques

Généreux, le quatuor revient sur scène pour nous achever à coups d’anciens titres qui vont tout de suite faire réveiller la foule et agrandir le mosh-pit. Inferno envoie un court solo derrière ses fûts en guise d’introduction, et ils commencent avec le très punk/thrash Pure Evil and Hate, un titre des premières années du groupe, avant de revenir à son répertoire plus empreint de death metal comme Antichristian Phenomenon. Nergal s’adresse une dernière fois à la foule, mentionnant qu’en 25 ans de carrière, le Canada a toujours eu une place spéciale pour Behemoth. Et le groupe d’enchaîner avec le monstrueux Conquer All qui sèmera encore le chaos dans la fosse, pour finir avec un marathon final non moins apocalyptique, nous servant le très brutal Slaves Shall Serve avant de conclure avec Chant For Eschaton 2000.

Quelle performance ! Après tant d’albums et d’années de carrière, de tournées, Behemoth est au sommet de son art. A l’inverse de certains groupes déjà sur le déclin après 20 ans, tournant seulement pour profiter d’un nom et d’une image qui leur permettent de faire encore un peu d’argent en servant la même recette réchauffée et fatiguée, les Polonais se surpassent et gagnent encore en ampleur, en originalité, en créativité. Leur flamme infernale brûle plus que jamais. Que le métal extrême soit. Amen.

 

Myrkur : la beauté des contrastes

Tel un ange déchu brillant d’une couleur vive au milieu d’une messe noire, la chanteuse danoise Myrkur, Amalie Bruun de son vrai nom, avait la tâche difficile d’ouvrir le bal. Un choix de première partie assez audacieux musicalement, face à un parterre de métalleux à moitié convaincu. Issue du monde de la pop, Myrkur évolue dans un univers sombre et planant mêlant piano et chant lyrique à un black métal assez cru et mid-tempo. Malgré une dimension atmosphérique et quelques riffs intéressant, le tout reste efficace mais on voit le manque d’expérience du groupe et la jeunesse du projet. Le pauvre bassiste cassera une corde dès le premier morceau, et sera ovationné pour son changement de corde éclair.

C’est finalement le visuel et l’aura de la chanteuse qui sauveront le tout. Vêtue d’une petite robe rouge, la charmante blonde joue avec un contraste appréciable entre la douceur de son apparence et le caractère cru et déchiré de sa voix hurlée et gutturale. Même si l’utilité de sa guitare BC Rich est discutable, l’image de la guitare démoniaque sur l’ange de velours valait le détour. Myrkur performe clairement mieux dans son élément : le piano et le chant lyrique et mélodique, où elle délivre une excellente performance. Dommage que le public ne respecte pas vraiment les passages plus calmes où le brouhaha est perceptible. Il aura manqué un élément de plus pour captiver la foule.

 

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