Centre du Théâtre d’Aujourd’hui | 50 ans de théâtre exclusivement québécois

Si la dramaturgie québécoise est aussi forte, vivante et en perpétuel renouvellement, c’est bien grâce au rôle essentiel exercé par le Centre du Théâtre d’Aujourd’hui depuis les 50 dernières années. Le CTD’A est en quelque sorte notre Comédie-Française, mais favorisant la création théâtrale plutôt que le répertoire chez les auteurs québécois, faisant en sorte que notre dramaturgie nationale atteigne la pleine et belle maturité qu’on lui connaît maintenant.

Il y avait quelque chose de très émouvant à voir réunis le soir de la célébration presque tous les directeurs artistiques qui ont fait l’histoire de ce petit théâtre devenu grand. Même que les organisateurs avaient prévu que les invités doivent passer par la ruelle derrière le théâtre de la rue Saint-Denis, pour mieux évoquer les origines modestes d’une scène accessible par un tronçon de ruelle du temps où le Centre du Théâtre d’Aujourd’hui squattait un ancien garage de l’avenue Papineau, près de la rue Sainte-Catherine, en sublimant complètement le lieu.

Le CTD’A a été fondé en 1968 par André Brassard, Jean-Pierre Saulnier, Rodrigue Mathieu, Michel Poletti et Pierre Colin, un noyau d’artistes téméraires provenant de l’effervescence de petites troupes comme les Apprentis-Sorciers, le Mouvement contemporain et les Saltimbanques qui y ont orienté et maintenu la mission de l’illustration de la parole dramatique québécoise.

Les affinités s’étant manifestées dès 1969 avec Les Enfants de Chénier, la troupe de Jean-Claude Germain, feront en sorte que le dramaturge iconoclaste sera nommé en 1972 premier directeur artistique du CTD’A. Comptant comme l’un des véritables pères de la dramaturgie québécoise, pendant 10 ans il raffermira les assises du lieu avec truculence et grande liberté créatrice. Les chanceux qui y étaient n’oublieront jamais l’impact de Les hauts et les bas d’la vie d’une diva, sa pièce fétiche consacrant le talent fou de la regrettée comédienne Nicole Leblanc qui était aussi son amoureuse.

* Sylvain Bélanger, Jean-Claude Germain et Marie-Thérèse Fortin. Photo par Maryse Boyce.

Suivront à la direction artistique Gilbert Lepage, Robert Lalonde, Michelle Rossignol qui a orchestré le déménagement du théâtre, René Richard Cyr, Marie-Thérèse Fortin et, depuis 2012, Sylvain Bélanger. En 50 ans, pas moins de 400 productions de plus de 300 auteurs dramatiques d’ici et quelque 3 000 artistes et concepteurs ont brûlé les planches restées chaudes du Théâtre d’Aujourd’hui.

La soirée d’anniversaire, animée par Guylaine Tremblay et Léane Labrèche-Dor, a donné lieu à de touchantes lectures d’extraits de pièces phares de Jean-Claude Germain, Victor-Lévy Beaulieu et Michel Garneau qui, entre autres, ont pavé la voie à la génération des Michel Marc Bouchard, Normand Chaurette, Larry Tremblay, Serge Boucher, Évelyne de la Chenelière, Dominic Champagne, Daniel Danis, et même l’immense Réjean Ducharme qui y a créé en 1994 La fille de Christophe Colomb dans une mise en scène de Martin Faucher.

* Léane Labrèche-Dor et Guylaine Tremblay. Photo par Maryse Boyce.

De la centaine de spectateurs que pouvait accueillir le CTD’A sur Papineau, il est passé à 250 places avec une scène à configuration variable, et s’est adjoint la petite Salle Jean-Claude-Germain qui en compte 75. Le bâtiment actuel de la rue Saint-Denis, où logeait jadis un cinéma porno jusqu’à sa conversion en 1989, continuera de grandir en se modernisant au terme d’une campagne de financement s’étalant jusqu’en 2021, avec l’objectif d’un million venu du privé.

La contribution des différents paliers gouvernementaux permettra ainsi au CTD’A de s’engager dans des travaux majeurs s’élevant à 2 M $. L’aire d’accueil du public se verra complètement réaménagée, l’équipement de scène spécialisé sera mis à nouveau, et les lucarnes patrimoniales typiques de l’architecture du Plateau Mont-Royal seront aussi restaurées.

Reste par ailleurs la marquise où le mot théâtre ne devrait pas figurer en noir sur fond noir, et qu’il faudrait de toute façon rebaptiser du nom d’origine redevenu actuel de Centre du Théâtre d’Aujourd’hui. Comme pour consacrer davantage le dynamisme des auteurs du théâtre québécois qui se sont trouvé une maison à la hauteur de cet art essentiel et de sa pérennité.

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