CMIM 2017 : Compte-rendu de la 1ère séance

Aujourd’hui s’ouvrait la 15e édition du Concours Musical International de Montréal dédié cette année au piano. Pendant dix jours, vingt-quatre candidats âgés de 19 à 30 ans et issus de 14 pays différents tenteront de se hisser parmi les six finalistes afin de peut-être remporter l’un des prix offerts.

C’est le Français Sélim Mazari qui a ouvert la première séance de ce mardi 2 mai. Le programme de la première épreuve consiste en un récital libre de 45 minutes. Le jeune pianiste a choisi de commencer avec deux sonates de D. Scarlatti. On le sent d’emblée dans son élément : le jeu est clair, équilibré et phrasé, le toucher est poétique et délicat sans pour autant être maniéré. Il enchaîne avec les Variations et Fugue Eroica op.35 de Ludwig van Beethoven. Œuvre délicate à apprivoiser, on peut reconnaître au jeune homme une certaine maîtrise de la pièce et un parti-pris pour une interprétation plutôt classique qui convient bien à son jeu limpide, et ce, malgré une certaine retenue, probablement due au stress de passer en premier. Sélim Mazari finit son passage avec la deuxième série d’Images de C. Debussy. On tombe facilement sous le charme de ses grandes recherches de couleurs et de timbres pianistiques, jusque dans les micro-pianos ainsi que de ces silences où il laisse raisonner le piano de la salle Bourgie.

La deuxième candidate nous vient de Corée du Sud. Helene Heejun Han nous propose un programme en deux parties. Dans un premier temps les Fantasiestücke op.12 de Schumann puis la Sonate pour piano op.26 de S. Barber. La pianiste apparaît de manière générale très solide. Ses Schumann semblent être pris dans une interprétation un peu trop neutre et dont les conduites de phrases semblent se dérober parfois trop vite. Bien réalisés, ils manquent cependant de folie et de fantaisie même si on la voit s’amuser lors de son passage. En revanche, sa sonate de Barber tranche grandement d’avec la première pièce. Très contrastée avec une recherche évidente de styles de jeu variés, on peut retrouver un discours dans lequel on ne se perd pas et qui nous tient alerte d’un bout à l’autre. La construction de la pièce trouve son apogée dans la fugue finale qui explose sans jamais que le son ne soit heurté.

Le troisième candidat était un autre français, Ismaël Margain, qui fut d’ailleurs demi-finaliste au CMIM en 2014. Cette année, le candidat a choisi un programme plutôt audacieux : la première partita de J.S.Bach, une pièce de Bach/Busoni intitulée Ich ruf’ zu dir, Herr Jesu Christ et la grande sonate op.110 de Beethoven. Sa partita est un régal pour les oreilles : Mr. Margain possède une très belle oreille et, de ce fait, sait faire ressortir la polyphonie de Bach de manière assez impressionnante : tout est compréhensible et équilibré. Les premières danses apparaissent très stables et le discours est toujours vivant. Il opte pour une interprétation plutôt baroque avec peu de rubato, tout en se permettant quelques libertés de tempo dans les menuets et la gigue. Sa pièce de Bach/Busoni est très belle, profonde et intérieure. En revanche, on le sent très fragile dans sa sonate de Beethoven, tout particulièrement dans l’Allegro molto et la Fugue finale. La pulsation a tendance à être instable même si l’on doit lui reconnaître une grande qualité sonore, particulièrement dans son Adagio. Reste à savoir si cela ne sera pas considéré comme trop romantique pour du Beethoven.

C’est Eddie Myunghun Kim, de Corée du Sud également, qui a terminé cette première séance. Il commence avec la sonate op.78 de Beethoven dans une interprétation plutôt classique et transparente. Il enchaîne ensuite avec la toccata BWV 564 de Bach/Busoni. Le candidat est extrêmement solide mais on finit par regretter qu’il n’y ait pas plus de fragilités à certains endroits afin d’avoir plus de variétés de son : son jeu paraît un peu trop pareil tout le temps et surtout, l’intensité atteint rapidement son apogée sans nous laisser le temps d’apprécier les passages plus doux. La dernière pièce est la Fantasie und Fuge über das Thema B-A-C-H, S 529 où le pianiste a tout le loisir de démontrer son extraordinaire virtuosité même si on peut encore une fois lui reprocher de saturer rapidement le son. En revanche, sa clarté de jeu est très agréable : les passages techniques ne sont pas noyés dans la pédale et très maîtrisés, comme la totalité de son programme.

Seulement quatre candidats passés et on note déjà quatre personnalités très différentes. Les auditions se poursuivent dès ce soir avec une nouvelle séance de quatre autres pianistes.

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