CMIM 2017 : Compte-rendu de la 6ème séance

La dernière séance du premier tour du Concours musical international de Montréal avait lieu vendredi soir avec des pianistes très convaincants.

C’est Yehin Noh, de Corée du Sud, qui débute la séance en proposant un programme de cinq œuvres permettant de mettre en lumière ses diverses facettes. Elle commence avec la Sonate en do majeur Hob. XVI:48 de Haydn avec un son très clair. On la sent plus présente et enjouée dans le Rondo contrairement à l’Andante con espressione. Elle enchaîne avec « Scalen » (Piano Etudes : N°4) de Chin où elle explore davantage les textures et les sonorités du piano, mais c’est dans le « Scarbo » (Gaspard de la nuit : N°3) qu’elle semble se sentir vraiment à l’aise en étant plus investie et en faisant chanter chaque voix comme s’il s’agissait d’instruments différents. Elle poursuit avec un Nocturne en do mineur, op. 48 n°1 de Chopin, simple et construit, réfléchi et ressenti, avant de conclure avec les Réminiscences de Norma, S 394 de Liszt où elle rend chaque voix vraiment singulière tout en les rendant tout à fait cohérentes. On peut lui reprocher une fin légèrement en force et presque trop rigide. Yehin Noh est sélectionnée pour la demi-finale.

Artem Yasynskyy, d’Ukraine, poursuit en proposant la Sonate en do majeure, Hob. XVI :50 de Haydn, avec une interprétation beaucoup plus personnelle que celle de Atsushi Imada et Ying Li la veille. On sent qu’Artem Yasynskyy s’est approprié la sonate en proposant un Allegro très feutré pour se réserver dans les mouvements suivants. Il interprète l’Allegro molto avec beaucoup de finesse et d’humour mais on aurait pu s’attendre à davantage de fantaisie. Il poursuit son programme avec le Prélude en la mineur de Ravel avec toujours beaucoup de délicatesse, et peut-être trop, surtout dans le premier mouvement, A la manière de Chabrier. Le second, A la manière de Borodine s’inscrit en parfaite continuité même si on aurait pu s’attendre à plus de contrastes et de nouveautés. Son jeu très approfondi et mature se perçoit en particulier dans les Variations sur un thème de Paganini, op.35 de Brahms où il fait converser les différentes voix de façon très brillante, avec beaucoup d’humour dans les dernières variations. On aurait pu toutefois s’attendre à plus de précision dans les articulations avec parfois un rendu un peu confus, mais on constate la parfaite maîtrise du discours musical et de la structure globale de l’œuvre. Il est également sélectionné pour la demi-finale.

Le troisième candidat nous vient de Russie. Alexey Sychev nous propose un programme également en trois parties. Il débute avec la Sonate en do majeur, op.53 (Waldstein) de Beethoven qui lui permet d’affirmer son son pur et clair, peut-être trop à certains moments. On ressent difficilement la stabilité rythmique dans le 1er mouvement en raison du caractère légèrement précipité. Les suivants sont en revanche beaucoup plus droits et avec une pulsation plus ancrée. Il poursuit avec la Sonate n°7 en si bémol majeur, op.83 de Prokofiev, avec une apparente facilité. Son début est très éloquent mais on peut lui reprocher sont manque de respiration dans les passages lents. Le tempo du 2ème mouvement semble un peu trop rapide en diminuant l’effet du passage final qui aurait pu être plus lugubre. Il en est de même pour le 3ème mouvement rendu presque hystérique mais témoignant ainsi d’une excellente maîtrise technique. Il termine avec « La Campanella » (Grandes études de Paganini, S 141 : N°3) de Liszt qui ne fait que confirmer ses qualités musicales. Alexey Sychev sera lui aussi en demi-finale.

Ho Yel Lee, de Corée du Sud, cloture la séance avec la Sonate en si mineur, Hob. XVI:32 de Haydn en proposant une interprétation propre mais trop standardisée. Il fait cependant preuve d’un son très voluptueux et d’une vision de l’œuvre dans sa globalité. Il poursuit avec la Fantaisie en do majeur, op.15 D760 de Schubert dans laquelle il fait preuve d’une grande maturité, et contraste ainsi fortement avec le Haydn. Ho Yel Lee se dévoile en apportant de nouvelles textures, beaucoup d’idées sans néanmoins se perdre. Il trouve un équilibre entre la fragilité touchante et la force vigoureuse, sans toutefois heurter l’auditeur. Il conclut avec La Valse de Ravel dans laquelle il nous fait totalement chavirer bien que la main gauche apparaisse un peu trop rigide aux évocations du thème. Bien que l’œuvre ait été avant tout écrite pour piano, on aurait pu s’attendre à davantage de couleurs orchestrales. On retient toutefois sa grande maîtrise du mouvement, indispensable pour cette œuvre.

Après les délibérations, André Bourbeau, président du jury a annoncé les 12 pianistes sélectionnés pour la demi-finale :

  • Stefano Andreatta (25, Italie)
  • Albert Cano-Smit (20, Espagne/Pays-Bas)
  • Zoltan Fejervari (30, Hongrie)
  • Teo Gheorghiu (24, Canada)
  • Nathanaël Gouin (29, France)
  • Giuseppe Guarrera (25, Italie)
  • David Jae-Weon Huh (30, Corée du Sud)
  • Yejin Noh (30, Corée du Sud)
  • Jinhyung Park (21, Corée du Sud)
  • JeungBeum Sohn (25, Corée du Sud)
  • Alexey Sychev (28, Russie)
  • Artem Yasynskyy (28, Ukraine)

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