Esmerine

Critique album: Esmerine – La Lechuza

Esmerine - La Lechuza Esmerine La Lechuza

Le duo instrumental devenu quatuor Esmerine lance un 3e album, comportant cette fois 3 titres chantés et le spectre de la défunte Lhasa de Sela qui flotte tout au long de l’écoute…

En fait, le fantôme de la chanteuse et musicienne ne fait pas qu’errer au-dessus de la mêlée : il fait carrément l’objet d’une chanson-hommage – la délicate Snow Day for Lhasa chantée en voix de tête par un Patrick Watson émouvant – au milieu de l’album, et s’incarne en toute fin du disque sur la complainte Fish On Land.

Cette dernière est en réalité une chanson inédite de Lhasa, chantée et interprétée par elle, en compagnie de Bruce Cawdron (aussi percussionniste de Godspeed You! Black Emperor) et Beckie Foon (violoncelle de Thee Silver Mount Zion), les 2 membres fondateurs et omniprésents de Esmerine.

Le troisième titre chanté est Last Waltz : une jolie valse où se côtoient les voix de Sarah Pagé (également harpiste au sein de la formation) et de Patrick Watson, à nouveau. D’ailleurs, Watson signe la réalisation de l’album et ajoute quelques touches de piano ici et là sur quelques titres.

Au rayon des invités spéciaux, toute la bande à Patrick Watson y met du sien, tout comme Sarah Neufeld (violoniste d’Arcade Fire) et Colin Stetson au saxophone. Le percussionniste Andrew Barr complète pour sa part la formation régulière.

Tous ont collaboré, de près ou de loin, à l’œuvre de Lhasa de Sela, et le contenu de La Lechuza (qui signifie La Chouette) a vu le jour dans les semaines et les mois après sa mort, ce qui explique que l’album en entier lui soit dédié.

Somptueuse lenteur

Contrairement à la tendance montréalaise en matière instrumentale, la musique de Esmerine ne se déploie pas comme un long feu d’artifice. N’attendez pas le crescendo cataclysmal typique du post-rock – à la Godspeed You! Black Emperor, Mogwai ou Explosions in the Sky – non plus…

Esmerine propose plutôt une musique lente, interprétée avec une délicatesse délibérée et volontairement dépouillée pour laisser les différents éléments (harpe, violon, violoncelle, délicates percussions, kalimba, marimba et autres) prendre leur place et se voisiner sans se bousculer.

La « musique de chambre moderne » de Esmerine, qui emprunte souvent à la musique expérimentale et d’avant-garde, flotte plus qu’elle ne frappe. Quelques titres donnent tout ce qu’il faut de rythme pour éviter que l’album ne soit morne : Sprouts joue avec la répétition de courtes boucles à la Philip Glass, alors que Little Streams Make Big Rivers se rapproche davantage de l’aspect progressif du post-rock avec une batterie de plus en plus rythmée qui tire la mélodie dans son courant.

La plupart du temps, toutefois, les morceaux sont empreints d’une mélancolie ou d’une étrangeté minutieusement construite.

La formule de Esmerine n’est certes pas pour tout le monde et exige un minimum d’ouverture et de patience, mais contient suffisamment de splendeur pour émerveiller l’auditeur qui lui donnera sa chance.

 

* Esmerine lancera son disque La Lechuza dans le cadre d’un concert à la Fédération Ukrainienne, à Montréal, ce samedi 4 juin.  Patrick Watson, Sarah Neufeld, Robbie Kuster, Mishka Stein et Colin Stetson seront également de la partie pour accompagner le quatuor.

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