Critique album | Kaiser Chiefs – Education, Education, Education, & War

Kaiser Chiefs - Education, Education, Education & War Kaiser Chiefs Education, Education, Education & War

Trois ans après la sortie de leur dernier album, les Kaiser Chiefs reviennent enfin avec une cinquième production studio au titre assez tapageur, Education, Education, Education, and War.

“I’m not an idiot. In order to get heard by more people you have to get seen by more people. And when it comes to exposure, TV is God.”, déclarait il y a quelques jours Rick Wilson, leader de la formation britannique et nouveau coach dans la version anglaise de l’émission The Voice. Le départ il y a 2 ans du batteur et principal parolier, Nick Hodgson, a sonné un glas chez les Kaiser Chiefs. Déjà sur le déclin, le groupe vivait amèrement le succès très mitigé de son quatrième opus, The Future is Medieval. Il est vrai que sa formule « à la carte » était intéressante. L’album était même plutôt bon au final, le quintette y avait expérimenté plus de choses, mais n’était ni parvenu à joindre son public, ni à en séduire un nouveau.

Entendons-nous, c’est probablement de « hits » qu’il manquait sur les dernières productions des Kaiser Chiefs. À vrai dire, de quoi l’on se souvient véritablement depuis Never Miss A Beat ?

Le groupe dévoilait il y quelques semaines un premier single, Coming Home, une ballade pop-rock assez banale, un brin mélancolique, sur laquelle Wilson s’illustre par de belles envolées lyriques. Pareillement, le reste de l’album n’apporte pas vraiment de surprises, ou presque… On est tout de même ravis sur certains morceaux de retrouver cette once d’explosivité qui a fait le succès des titres majeurs d’Employment et Yours Truly, Angry Mob (RubyI Predict a RiotThe Angry Mob…).


 

« Learnt My Lesson Well »

Education, Education, Education, and War ressemble définitivement plus à un album des Kaiser Chiefs que The Future is Medieval. Il sonne comme une tentative de réconciliation avec les fans : un retour aux sources vers une époque bénie, qui plaçait à l’époque le groupe, avec Franz Ferdinand et Coldplay, comme meneurs incontestés sur la scène musicale britannique.

Fruit d’une collaboration avec un tout nouveau membre, Vijay Mistry, les Kaiser Chiefs ont également reçu l’appui de Ben H. Allen (CeeLo Green, Animal Collective) à la production, et Fraser T. Smith (CeeLo Green, Adele) sur l’écriture de trois morceaux lors de l’enregistrement à New York l’an passé. Ainsi, l’album divulgue des titres assez accrocheurs, aux refrains efficaces, et qui amènent certaines subtilités que le public est facilement à même d’intégrer, et reconnaître en conséquence.

À titre d’exemples, le morceau d’ouverture, The Factory Gates, plante une atmosphère assez biscornue : du vent, des mouettes, et un étonnant son au clavier qui rappelle la cornemuse ; on est tout droit embarqué dans les Highlands. Sur Misery Company, Wilson amène son rire sarcastique un peu à la manière de son célèbre Na Na Na Na Naa (mais qui ressemble étrangement à celui d’Hasil Adkins ?), sur  une rythmique très solennelle qui introduit des solos efficaces au clavier et à la guitare. Comme Bows & Arrows, ou Ruffians on Parade, c’est certainement le genre de titres qu’on a envie d’entendre sur toutes les ondes, et pour lesquels on ira voir les Kaiser Chiefs se déchainer en concert sur la tournée à venir.

« Everything Is Average Nowadays »

À l’inverse l’album n’apporte enfin de compte pas véritablement de profondeur. La plupart des morceaux sont construits sur des grilles d’accords assez classiques, et plutôt efficaces au final… Mais voilà, les ballades comme Roses, ou Meanwhile up In Heaven… Ça se laisse bien écouter, mais d’aucuns n’admettront que les Kaiser Chiefs ont probablement déjà fait le tour de la question, surtout à l’heure ou des groupes comme Foals, The Macabees, ou Bombay Bicycle Club, poussent le terme « progression » comme nouveau mot d’ordre sur la scène indie britannique.

On est tout de même agréablement surpris à plusieurs reprises, et l’avant-dernier morceau, Cannons, est certainement le plus intéressant de l’album. Il joue à alterner entre un refrain assez classique, très « Kaiserien » même pourrait-on dire, et un pont plus atypique. Wilson prend un accent étonnant et accélère son injonction sur une bourrasque militaire à la caisse claire (« look alive/pick a side/draw a line in the sand »). Le titre explose sur des bruits de mouettes et de vaches (décidément très en vogue), avant d’introduire un poème inspiré par le centenaire de la Grande Guerre, The Occupation, écrit par le chanteur et récité par l’acteur anglais Bill Nighty.

Sur la durée, Wilson dresse un portrait un peu naïf de la guerre, aborde des thème sensibles de la société anglaise de 2014, sur un ton satirique le plus souvent mais tout en restant très politiquement correct. Il ne creuse pas vraiment son message et n’apporte rien de neuf en fin de compte. C’est peut être sur ce point que l’absence d’Hogdson se fait le plus ressentir.

« Try Your Best » ?

Le message est passé tout de même. Education, Education, and War n’est pas un mauvais album, il se laisse même plutôt bien écouter, et d’une certaine façon réconcilie avec la bande de Leeds. Des pièces comme Misery CompanyBows & Arrows, ramènent un peu de cette ardeur oubliée, et troublée dans des tentatives d’expérimentation à demi-teintes sur The Future is Medieval.

Wilson et ses comparses ont prouvé qu’ils étaient capables de sortir de leur sphère indie pop-rock et créer des pièces assez extravagantes. On aurait bien aimé que le groupe creuse un peu plus ces élans de folie sur l’album, et combine intelligemment des morceaux fédérateurs et des compositions plus alternatives, un peu à la manière de Foals justement.

C’est dommage.

 

À écouter : Misery Company, Bows & Arrows, Cannons

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