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Critique album | tune-yards – Nikki Nack

tUnE-yArDs - Nikki Nack tUnE-yArDs Nikki Nack

Parfois, pour pleinement apprécier une œuvre musicale, de nombreuses écoutes sont requises. Souvent deux ou trois, quelque fois davantage. Dans le cas du plus récent album de tune-yards, le projet musical de la chanteuse Merrill Garbus, c’est plutôt une bonne dizaine d’écoutes qui sont requises pour commencer à réellement apprécier Nikki Nack, une série de chansons qui défient toute attente et toute logique, et qui prouve que du chaos peut surgir la beauté.

Entourée des producteurs Malay et John Hill, et de son coéquipier de longue date Nate Brenner à la basse et l’écriture des chansons (seul autre membre régulier de la formation), Garbus nous plonge immédiatement dans un univers qui diffère légèrement de ce à quoi elle nous a habitués, du moins musicalement. Exit le ukulélé, faisons entrer ici des synthétiseurs et batteries électroniques, et une marée de clappements de mains.

Par contre, le style de composition demeure le même et on reconnaît immédiatement la touche tune-yards, et cette touche se caractérise principalement par la voix, cette voix unique que possède Merrill Garbus. À la fois criarde et poignante, juste et douce et pure, cette voix nous fait passer par diverses émotions au fil des 13 pièces de l’album.

Au premier abord – et c’était le cas pour les deux albums précédents également – ses paroles semblent résulter de sessions d’écriture automatique. Elle chante à propos de relations amoureuses complexes ainsi que de problèmes plus universels, et ce, avec des vers qui dépassent souvent en longueur la mélodie. Empruntant au hip-hop, au scat, et à foule d’autres styles, Garbus mêle les genres et crée un style qui est sien. Le son qu’elle crée est totalement unique, c’est un son qu’elle raffine d’un album à l’autre et que bien qu’il soit quelque peu rébarbatif, il se laisse apprivoiser lentement et découvre ses charmes à la longue.

L’album possède de bien bons moments : Find a New Way, qui tout de suite met au défi l’oreille de l’auditeur et nous plonge dans l’univers musical bigarré de Garbus. On se souviendra qu’en 2012, tune-yards avait participé à une reprise de la chanson « Lady » du légendaire Fela Kuti, avec ?uestlove et d’autres invités. En quelque sorte, Nikki Nack semble taillé dans la même étoffe, avec des influences africaines, ou plutôt haïtiennes, Garbus ayant passé quelque temps dans ce pays avant d’enregistrer l’album.

Ces influences se font entendre entre autres dans l’extrait radio Water Fountain, une chanson extrêmement intéressante construite autour de la comptine Old Molly Hare (et pour laquelle une vidéo sacrément amusante fut lancée récemment). L’énergie de la musique se met au service des émotions générées par le texte pour créer un tout savoureux qui culmine en une finale explosive.

On se serait passé de l’interlude au milieu du disque, un petit moment humoristique qui n’apporte pas grand-chose (stylistiquement, ça fait penser aux interludes de Zappa sur Sheik Yerbouti et autres albums), mais ce n’est qu’un accroc mineur dans un ensemble de grande qualité.

Le disque ne ressemble à rien d’autre et mettra au défi la patience des auditeurs, c’est certain. Chaque pièce est une œuvre d’art en soi, qui mérite d’être explorée et décortiquée. C’est complexe, coloré, unique, complètement cinglé par moment, et surtout, c’est totalement tune-yards.

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