Erik Truffaz

Critique | Erik Truffaz à L’Astral de Montréal

Jeudi 25 octobre 2012 – L’Astral (Montréal)

Un jeudi soir et une salle comble. L’atmosphère était optimale à l’Astral jeudi soir dernier, alors que la salle recevait le trompettiste suisse Erik Truffaz et son quatuor formé de Marcello Giuliani à la basse, Marc Erbetta à la batterie et Patrick Muller au clavier. Les quatre ont assurément pu se mettre en valeur.

Dès l’entrée en scène des musiciens, Erik Truffaz a mis en vedette quelques pièces de son plus récent album El Tiempo de la Revolucion. Rapidement, la plus grande lacune de l’album est devenue le grand atout du spectacle.

Même à la suite de nombreuses écoutes, l’album continuait de paraître monotone et sans climax. Mais ces traits de discrétion et de prudence ont réellement fait le spectacle. La section rythmique a solidement soutenu les improvisations et les mélodies de Truffaz.

Celles-ci ont, par moments, cherché à souligner sa virtuosité alors qu’à d’autres moments des longues et simples notes ont fait soulever une sensibilité. C’était l’échange optimal entre passion intense et passion réservée.

Truffaz a aussi parfaitement su respecter les acquis du jazz sans tomber dans du simple recyclage. Trop souvent les artistes jazz contemporains tentent d’en faire trop. Ils mettent à la porte les notions les plus chères de la musique comme les chiffres indicateurs et la tonalité et tentent de réinventer la roue.

Les rythmes bien structurés du quatuor ont permis des moments fort entraînants où l’on pouvait se laisser embarquer dans des séquences dont on ne pouvait souhaiter la fin.

Certes, le batteur s’est trop laissé guidé par des rythmes rock par moments alors qu’il aurait pu insérer davantage de style swing. À d’autres moments, les improvisations du claviériste empruntaient des styles de sons typiquement associés au rock progressif, ce qui a été beaucoup trop fait dans le jazz fusion.

Finalement, malgré la prouesse du bassiste, il manquait juste qu’il sorte la contrebasse pour quelques numéros.

Mais ces critiques font plutôt office de suggestions. Car, le personnel de Truffaz a merveilleusement soutenu leur leader. À la suite du premier départ de scène, avant le rappel, le batteur s’est emparé d’un micro et s’est lancé dans une improvisation vocale de plusieurs minutes. Ce moment était aussi absurde qu’apprécié. Moment pendant lequel il a cogné le micro contre son visage, le tout ponctué d’effets sonores de bon goût.

Devant un public civilisé, mais qui n’a jamais manqué d’enthousiasme, Erik Truffaz et son groupe ont offert une prestation variée d’un peu plus de deux heures. L’intérêt des spectateurs était palpable dans la mesure que leurs applaudissements et leurs cris ne servaient pas seulement à ponctuer les solos.

De nombreux spectateurs ont manifesté leur approbation à tout moment, contribuant à ce beau désordre qu’un spectacle de jazz se doit d’être.

Comme si Truffaz n’en avait pas offert assez, son rappel a mis en vedette la chanteuse suisse, Sophie Hunger. Celle-ci s’est affichée en arborant une éclatante robe rouge pendant deux numéros en nous offrant une prestation sincère et authentique. On pouvait même dire que le bris technique mineur qu’elle a dû subir pendant quelques secondes a contribué à cette authenticité.

Le public était au rendez-vous et la salle ne pouvait pas mieux faire. La musique d’Erik Truffaz a su créer l’équilibre entre conventionnel et expérimental en mélangeant des sons plus électroniques et des sons totalement naturels.

Les intelligentes discrétions musicales de Truffaz ont permis au public d’apprécier l’artiste dans son entièreté dans cet espace parfaitement intime.

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