André Sauvé

Critique – Juste pour rire | André Sauvé présente Être au Théâtre Maisonneuve

André Sauvé n’est pas exactement le plus reposant des personnages. Ça, on le savait déjà. Son premier one-man suscitait le rire tout en permettant à l’intellect de faire un peu d’exercice. Mais son deuxième one-man show – un spectacle philosophico-humoristique intitulé Être – en fait plus que jamais la preuve : le petit hamster que contient cette boîte crânienne hirsute pédale sans arrêt. 

Photo par Richard Mercier.

Photo par Richard Mercier.

Déjà, le titre annonçait un spectacle pas simplet du tout : Être. Mais par où commencer ?  C’est précisément la question sur laquelle André Sauvé débute son spectacle, soulignant ce qu’un prof de philo explique à ses étudiants dès le premier cours. Les humains ont la conscience d’être humains. Contrairement aux animaux. « Une vache qui broute ne sait pas qu’elle est vache qui broute », comme le dit si bien l’humoriste.

Et c’est parti pour une longue réflexion sur le paradoxe d’être, d’en être conscient et de ne pas savoir comment l’être.

Dur à suivre ?  Pas vraiment. C’est là la grande force d’André Sauvé : il aborde des sujets éléphantesques, à des kilomètres de l’humour d’observation conjugale ennuyeux qui nous est trop souvent servi en humour, mais avec une faculté de vulgarisation phénoménale et des outils de communication extrêmement efficaces. Et surtout, avec humour.

Être n’est pas vraiment un feu roulant de gags. On rit, c’est certain, mais il arrive que le spectateur doive écouter l’humoriste se lancer dans de longues mises en contexte, comme un grand explorateur dont le pays présenté serait la psyché humaine. Mais il est fin conteur, André Sauvé. On le suit dans les moindres recoins de cette vaste forêt que semble être son esprit.

Comment profiter du moment présent, tiens. L’humoriste admet ne pas en être capable. Pas dans la douche, ni même en vacances à Coconut Beach. Il illustre d’ailleurs ce « moment présent » de façon brillante : comme une mince craque entre les deux immenses réservoirs que sont le passé et le futur.

Le tout pourrait être lourd, mais son contenu est heureusement entrecoupé de petites notes aléatoires, de petits « one-liners », façon André Sauvé. Un peu comme lors de ses chroniques aux côtés de Marc Labrèche.

Photo par Richard Mercier.

Photo par Richard Mercier.

Parlant de coq-à-l’âne, son petit numéro de bricolage, constamment interrompu par des divagations sans queue ni tête, allège aussi le spectacle.

La finale, à elle seule, vaut le prix du billet. Si les Olivier l’échappe dans les nominations pour le numéro de l’année, ce sera une grande injustice.

André Sauvé, on le devine, n’est pas exactement dans sa zone de confort lorsque vient le temps de faire la causette. Il préfère discuter de choses plus profondes, comme le système sanguin des girafes (!) ou encore, la copulation de l’escargot. Alors imaginez le malaise dans un cocktail…

C’est le portrait qu’il nous dresse. Dans une mise en scène limpide et ingénieuse (chapeau à Josée Fortier), l’humoriste nous illustre sa maladresse en situation de 5 à 7, un genre de cauchemar qui se termine dans un étrange ballet où le passé de danseur d’André Sauvé – il a étudié, pratiqué puis enseigné le Bharata Natyam, une danse classique de l’Inde – est mis à profit pour créer un effet théâtral sidérant.

André Sauvé a du génie. Ça aussi, on le savait déjà. Ce n’est toutefois pas avec Être qu’il atteint son pinacle, mais le chemin pour s’y rendre semble être bien tracé. À ce rythme-là, le troisième one-man show pourrait bien être la meilleure chose présentée en humour au Québec depuis les belles années de Deschamps…

 

Photos en vrac 
(par Richard Mercier)

Photos de André Sauvé

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