Au champ de Mars

Critique théâtre: Au champ de Mars au Rideau Vert

Présentée un peu partout au Québec depuis septembre et en première au Théâtre du Rideau Vert à Montréal le 1er novembre dernier, la pièce Au champ de Mars – écrite par Pierre-Michel Tremblay – trace un portrait brillant de ce à quoi un choc post-traumatique de guerre peut ressembler. Et vous aurez jusqu’au 12 novembre pour le constater.

Photo par Suzane O'Neil

Éric est un jeune soldat de l’armée canadienne qui rentre d’Afghanistan.  Pris de troubles psychologiques depuis son retour, il consulte une thérapeute, Rachel, qui elle-même n’est pas dans le meilleur des états. Alors que d’un côté, Éric tente de faire du mieux qu’il peut avec les émotions qu’il a vécues à la guerre, doublé d’hallucinations d’un sergent qui tente de lui dicter sa conduite, Rachel, elle, tente de se guérir grâce à la musique en prenant des cours de clarinette, donnés par un extrémiste pacifique. À cette histoire se mêle Marco, un réalisateur qui rêve de faire un film de guerre.

Le décor est simple: d’un côté, l’appartement miteux d’Éric, de l’autre, le bureau de Rachel. L’efficacité de la mise en scène, dirigée par Michel Monty, est indéniable ; on se serait tiré dans le pied en voulant compliquer la chose. On passe d’une scène à l’autre sans problème et ça coule tout au long de l’heure et quart que dure  la pièce.

 

Un parfait crescendo

Bien qu’au début, le rythme est plutôt lent et l’humour assez sage, plus on se laisse embarquer dans l’histoire et entraîner par les personnages, plus les rires sont francs et fréquents.

C’est certainement Mathieu Quesnel, dans le rôle du soldat Éric, qui mérite le plus d’applaudissements quant à l’efficacité du rythme et la véracité de la pièce. Son interprétation d’un ex-combattant avec ses airs d’adolescent attardé réussit à nous faire rire, à nous toucher, mais surtout à nous faire comprendre et ressentir ce qu’un soldat laissé à lui-même au retour de la guerre peut vivre.

Le personnage de Marco le réalisateur, joué par un surexcité Stéphane Jacques, est probablement celui qui donne le ton humoristique le plus léger de la pièce. Quoique doté de quelques répliques prévisibles, Stéphane Jacques réussit à lui seul à alléger la pièce avec des interactions efficaces, que ce soit avec le soldat ou Rachel, interprétée par Josée Deschênes.

Cette dernière, bien que présentée comme l’un des personnages principaux de la pièce, est plutôt effacée dans son rôle de psychologue dépressive. Bien qu’elle détienne quelques lignes « punchées », ses interactions avec son professeur de clarinette, Antoine, interprété par Justin Lamaré, sont certainement les moins intéressantes de la pièce de Pierre-Michel Tremblay.

 

Et la morale de l’histoire…

Bien ficelés d’humour, avec quelques pointes dramatiques, le jeu de Mathieu Quesnel et le texte de Tremblay nous transportent tout au long de la pièce vers un sentiment qui n’explose qu’à la toute fin : celui de la compassion. En effet, le personnage d’Éric vient nous surprendre dans les dernières minutes de la pièce, tombant dans une zone dramatique jusque-là encore inexplorée, alors que les éléments du casse-tête se place pour métamorphoser une envie de rire en un constat de société bien tristement réel.

À voir à Montréal jusqu’au 12 novembre, mais également ailleurs au Québec du 29 novembre au 30 décembre 2011.

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