Jamaica

Entrevue avec Antoine Hilaire du duo Jamaica

Le duo pas-du-tout-reggae Jamaica viendra présenter son tout premier album No Problem en Amérique du Nord ce printemps et s’arrêtera notamment au Belmont sur le boulevard, à Montréal, le 18 avril 2011. Sorti en septembre 2010 en France, No Problem propose 11 titres énergiques et compte notamment sur l’apport de Xavier de Rosnay (Justice) à la coproduction et Peter Franco, l’ingénieur de son de Daft Punk.

Sorstu.ca s’est entretenu au téléphone avec le sympathique cousin parisien Antoine Hilaire, qui forme cet explosif duo électrorock à saveur résolument pop avec Florent Lyonnet.

Pourquoi appeler un groupe « indiepopélectrorock » Jamaica ?  Ce serait un peu comme nommer un projet death metal Nashville ou un groupe country/western Shanghai… Le contraste vous amusait ?

C’est drôle que tu dises ça : on dirait que je dois toujours spécifier aux journalistes qu’on est conscient que Jamaica, c’est un très mauvais nom de groupe rock! Tout comme Lisbonne serait un très mauvais nom de projet fado…

Au départ, on pensait intégrer plein de choses, mais au final, on a décidé de se concentrer sur ce qu’on fait de mieux, c’est-à-dire du rock rapide. (rires)

Jamaica est né des cendres de Poney Poney, un trio qu’on n’a pas beaucoup connu ici au Québec, complété par Florent Lyonnet et Samuel Nicolas. Qu’est-ce qui a justifié le changement de nom et de direction, outre le fait que Jamaica soit maintenant un duo?

C’est vraiment le départ de Samuel qui a tout déclenché. Poney Poney était un peu timoré, il y avait peu de place pour laisser transparaître certains sons que nous exploitons davantage avec Jamaica.

Ce n’était pas réfléchi comme ça, on a tout simplement maturé et décidé de mettre certaines sonorités de l’avant.

On remarque d’ailleurs, dès la première écoute, que vous mordez à pleines dents dans la pop, que vous l’assumez totalement, ce qui fait contraste avec les nombreux artistes indie qui tentent d’intégrer le plus grand nombre d’influences recherchées possible pour se créer un son et s’éloigner de la pop bonbon.

La pochette de "No Problem", 1er album de Jamaica

C’est vrai, plusieurs groupes optent pour ça. Nous aussi, on écoute du rap, du rock progressif, toutes sortes de choses qui n’ont rien à voir avec notre musique.

(Notre son), c’est une esthétique très réfléchie. On prend notre musique très au sérieux. On a volontairement voulu se singulariser, se détacher d’une approche psychédélique que tout le monde semble emprunter.

Comme vous êtes des Français qui chantent en anglais dans un style «rock rapide » un peu électro, on vous compare souvent à Phoenix. Est-ce que cette comparaison vous embête ?

Pas du tout. Mais je me mets à leur place, et peut-être qu’eux, ça pourrait les déranger.

C’est un groupe qui a 10 ans d’avance sur nous. Ils ont quatre albums, ils ont leur style et personne ne fait de la musique comme eux.

On adore ce qu’ils font et c’est flatteur pour nous.

Vous avez travaillé dans le même studio (celui de Philippe Zdar de Cassius, à Paris) tout juste après qu’ils aient eu complété leur album Wolfgang Amadeus Phoenix. Les avez-vous rencontrés ?

Oui, on les a croisés à quelques reprises. On leur a même donné des t-shirts et je les ai même vus les porter !

Christian (Mazzalai, guitariste de Phoenix) m’a même dit quelque chose qui m’a fait grand plaisir. Il m’a dit : « vous avez réussi à faire ce que vous vouliez : un disque à la fois pop et à l’avant-garde ». C’est un garçon très intellectuel alors je ne suis pas certain d’avoir tout à fait compris…

Vous sentez-vous avant-gardistes ?

En fait, je crois avoir compris, un peu. Nous avons bossé très fort sur cet album, particulièrement au niveau de la production. En studio, nous avons ajouté tout plein de détails aberrants, nous avons poussé le bouchon très loin.  C’est le genre de truc que les musiciens et les audiophiles peuvent remarquer… C’est un « statement » très fort.

Pour plusieurs, No Problem est un disque très propre et rentre-dedans, dans le bon sens du terme. Mais les radios trouvent ça trop agressif, étrangement. On a quelques solos de guitare assez agressifs, qui poussent la note, il faut dire…

Vous vous amusez d’ailleurs avec cette idée de « solo radical » dans votre vidéoclip pour la chanson I think I Love U 2.   (vers 1:42)

D’où vous est venue l’idée de produire un vidéoclip faussement biographique ?

On était en train de finir l’album, et il nous fallait un premier extrait pour lancer tout ça. So-Me, l’un des deux réalisateurs du vidéoclip (avec Machine Molle), est venu écouter l’album avec nous en studio et il avait envie de faire notre premier vidéoclip pour nous « aider à préciser le propos », disait-il. C’est presque lui qui a choisi le morceau qu’on devait utiliser pour présenter le groupe.

On s’est dit que, pour présenter un groupe, il n’y a rien de mieux qu’un faux documentaire. On voulait faire comme les « Classic Albums », tu sais, comme les documentaires sur Metallica, par exemple, et comment ils ont fait l’album noir.

C’était saugrenu comme idée de le faire pour un groupe méconnu, qui n’a même pas encore sorti son premier album !  C’est souvent comme ça avec nous : si c’est saugrenu et culotté, c’est souvent la meilleure chose à faire.

Et sur scène, comment arrivez-vous à reproduire tous les détails présents sur l’album, puisque vous êtes juste deux ?

Pour la scène, nous sommes accompagnés (du batteur) David Aknin, qui avait fait quelques trames de batterie sur l’album. C’est forcément plus rock avec une batterie directe, alors on prend quelques libertés par rapport au disque.

Mais pas trop quand même. On utilise pas mal les mêmes sons. J’utilise d’ailleurs le même ordinateur pour les sons de guitare. Je trouve ça dommage, en 2011, de ne pas proposer aux gens le son qu’ils retrouvent sur le disque.

* Jamaica sera en spectacle au Belmont sur le boulevard, à Montréal, le 18 avril 2011. Le premier album de Jamaica, No Problem, sera rendu disponible au Canada dès le 12 avril.

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