La Loba

Entrevue avec Elyze Venne-Deshaies | La Loba : Un tremplin pour artistes émergents

L’offre en concert n’a jamais été aussi forte à Montréal, mais les petites salles meurent à petit à feu. Pourtant, certaines personnes se démènent dans leur quotidien pour leur donner crédit en étant des incubateurs de talents. Zoom sur Elyze Venne-Deshaies et sa plateforme La Loba qui cherche à casser les plafonds de verre et rendre ses lettres de noblesses à la musique underground montréalaise.

Être sur tous les fronts et garder tout de même cette curiosité qui anime les mélomanes de ce monde, ce portrait peut correspondre à celui qu’incarne Elyze Venne-Deshaies. Saxophoniste dans divers projets musicaux, elle s’est en parallèle établie comme une personnalité forte dans la programmation et le montage de soirées musicales à Montréal. Un immense terrain de jeu dont la jeune femme a bien saisit les caractéristiques, elle qui s’intéresse depuis longtemps à ce que peuvent proposer les petites salles face aux grandes scènes de la métropole.

« Il est nécessaire qu’il y en ait encore, dit-elle. Les petites salles ne peuvent pas toutes disparaître parce que sans elles, je n’aurai jamais fait un premier show. Elles donnent la chance à des plus petits bands de jouer et en même temps d’offrir une programmation éclectique. »

 

Créer une plateforme locale et collaborative

Propulser des groupes émergents sur les scènes de l’Esco, de la Casa del Popolo ou encore du Divan Orange (dont on ne se réjouit certainement pas la fermeture…) procure chez Elyze Vennes-Deshaies une dose d’adrénaline suffisante pour y établir un véritable laboratoire de collaborations et de partage musical.

Et c’est à travers sa plateforme multitâches La Loba que la trentenaire fait ses armes depuis septembre dans le vaste monde de la production musicale. Un monde dont elle encourage le Do It Yourself (DIY), nécessaire à l’épanouissement des divers partenaires, ou le principe du Pay What You Can (PWYC) pour encourager les spectateurs à vivre une expérience auprès des artistes locaux sans se ruiner.

Gérante de ce projet qui a réellement pris dix ans à se concrétiser, Elyze saisit toutes les occasions pour y intégrer des collaborateurs montréalais dans les domaines aussi variés que le pressing de cassettes, l’imprimerie de flyers ou la réalisation de sérigraphies notamment par la compagnie locale Sel & Vinaigre. Un échange de services qui permet aussi de réduire les dépenses et créer par la même occasion des liens forts entre les acteurs de l’industrie musicale montréalaise et du Québec en général. Car oui, si La Loba s’insère dans le tissu montréalais, des shows en région se programment tout autant comme à Québec ou Chicoutimi où Rue Racine Records est par exemple devenu depuis peu un partenaire.

On peut être dans un coin et chialer. Moi, j’ai opté pour l’option d’être pro-active et réfléchir à qu’est-ce qui ne fonctionne pas.

Ouvrir des brèches musicales

Avec La Loba, il y a aussi cette volonté d’ouvrir des brèches plutôt que de perpétuer des clans déjà existants et qui bloquent, d’une certaine façon, l’accès aux salles pour les musiciens moins reconnus. Selon elle, « il y a beaucoup de groupes qui sont consanguins, qui se recomposent avec leurs membres en de nouveaux groupes et qui finalement se réservent les salles entre eux. »  À travers son projet, Elyze cherche à briser cette tendance en élaborant des évènements ponctuels ou mensuels tels que le projet Lunes (en collaboration avec Side Projects), une soirée exclusivement consacrée à l’expression artistique collaborative des femmes en chanson, poésie ou danse (voir notre critique ici).

La Loba s’installe donc petit à petit comme une plateforme qui laisse la chance aux talents cachés de s’exprimer. Et loin pour Elyze l’idée de faire de ces projets des actes féministes. Si elle ne se cache pas d’être proche de la cause, elle considère que la confrontation dessert la cause musicale. La preuve avec le groupe punk Jane Don’t dont elle a offert une vitrine au Divan Orange et qui intègre en son sein un batteur au milieu d’un groupe de rockeuses. Dès lors, la contrainte d’une sous-représentation des femmes dans le monde musical se mue progressivement en une création de nouveaux espaces d’expression pour elles.

Une belle évolution pour l’industrie qui souligne aussi l’importance de travailler de manière concrète sur les problèmes observés. « On peut être dans un coin et chialer, dit-elle. Moi, j’ai opté pour l’option d’être pro-active et réfléchir à qu’est-ce qui ne fonctionne pas ». Une démarche qui permet ainsi à La Loba de valoriser des artistes émergents à retrouver prochainement notamment au Quai des Brumes le 13 mars pour une nouvelle soirée Lunes ou le 14 mars au Divan-Orange pour le lancement des très punk Dates (avec Destruction Derby, DJ Prometea et des invités).

Consultez également le compte-rendu de la soirée Lunes

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