Jordan Klassen

Entrevue avec Martin Perizzolo | Dernier trip de Q

Martin Perizzolo parlera de Q une dernière fois le mardi 2 décembre 2014, au Café Cléopâtre, à Montréal. En fait, l’Artiste Zoofest 2013 présentera son fameux spectacle épicé de 60 minutes deux fois plutôt qu’une, à 19h30 puis 21h30, pour les fins d’une captation vidéo réalisée par son pote Adib Alkhalidey. Récit d’un entretien avec l’artiste-humoriste-esprit-universel verbomoteur, avant qu’il tourne la page sur ce sujet autrefois tabou.

Photo par Manon Boquen.

Photo par Manon Boquen.

 

Les humoristes ont cette tendance à la polyvalence qui leur sourit. Perizzolo est loin de faire exception. Au contraire : certains le connaissent comme Benoit, le « connaisseur » des Fromages d’ici, pour d’autres c’est Poudy aux côtés de Chabot (Mike Ward) dans L’Gros Show, ou plus récemment, Jean-François dans Les Beaux Malaises. Il est aussi chroniqueur chez Urbania. Humoriste, également, bien sûr. Et tout un placoteur.

Photo par Manon Boquen

Photo par Manon Boquen

Rencontré dans un café, le sympathique blondinet à lunettes – qui compte, mine de rien, vingt ans de métier – se livre avec abandon, sans trop en dévoiler sur ses projets futurs. Pour le moment, il veut parler de son spectacle Q, un one-man show de 60 minutes traitant exclusivement de sexe, présenté d’abord lors du Zoofest 2013, puis en version plus stand-up à l’été dernier. Un spectacle couronné de succès auprès du public Zoofest, mais jamais parti en tournée, en raison d’un conflit de visions artistiques avec le producteur qui devait lui permettre de sillonner le Québec.

« J’ai fait ce show-là parce que j’avais jamais parlé de cul avant. Ça en était rendu un tabou : aussitôt que ça allait là, je n’y allais là pas. Je voulais enlever ce tabou-là, me salir. Artistiquement, la job est faite. Il m’a apporté ce qu’il avait à m’apporter. »

Le sujet est pourtant riche, et rarement exploité avec cette approche très franche et sans rire gras ou jokes de mononcles. C’est cru, parfois vulgaire, et sans gant blanc, mais on y trouve aussi beaucoup d’émotion et de réalisme. C’est cette approche qui intéressait Perizzolo dès le départ. « Pas que je veule banaliser le sujet, mais je trouve que c’est un sujet dont on devrait parler davantage. Y’a rien de mal à ça. Chacun a son rapport à la sexualité, mais on est plusieurs à aimer ça, à trouver ça le fun, c’est souvent même primordial dans une relation. »

Cette vision ludique et humaine de la sexualité arriverait pourtant à point à une époque où un certain animateur anglo-canadien à la barre d’une émission de la CBC qui porte – oh l’ironie – le même nom que le one-man show de Perizzolo défraye les manchettes. Au moment où ce scandale cause tout un brouhaha, les médias sociaux font ressortir les aspects les plus sordides des pratiques sexuelles de certains. « Moi aussi, je trouve ça ironique d’arrêter de le faire (à ce moment-ci). Si on en parlait un peu plus ouvertement, peut-être que les situations comme celles-là ne se rendraient pas aussi loin. »

Alors pourquoi s’arrêter au moment où le sujet abordé provoque tant de houle, et où son point de vue pourrait réhabiliter l’idée même du plaisir de la Chose avec un grand C ? Artistiquement, Perizzolo a l’impression d’en avoir fait le tour, voilà tout. « J’en avais jamais parlé avant, mais je ne veux pas en venir à un point où je ne me surprendrais plus – et que je ne surprendrais plus personne – à parler seulement de ça. »  Peu à peu, il écrit d’autres numéros qui n’ont rien à voir avec le contenu de Q, et le temps est venu de passer à autre chose.

Photo par Manon Boquen.

Photo par Manon Boquen.

 

 

Captation par Adib Alkhalidey

Alors donc, deux dernières représentations de Q seront données mardi, dans le but premier de les capter. Pour les présenter sous quelle forme ?  Probablement sur Internet, mais aucune autre avenue n’est écartée.

Le spectacle sera pratiquement identique à la version de l’été 2014, qui était plus punchée, plus standup que la version 2013, qui était elle plus émotive, afin de « se dédouaner de ce sujet-là ».

Photo par Manon Boquen.

Photo par Manon Boquen.

Le lieu sera bien différent toutefois : le Café Cléopâtre, lieu mythique où danseuses et dragqueens se croisent dans les escaliers, le tout dans un décor un peu crade. « Moi, je voulais carrément un bar de danseuses, avec un stage de danseuses, et le poteau, tout ça. »  Ce ne sera pas exactement le cas, mais l’ambiance et le décor refléteront ce genre d’espace. « C’est une façon d’avoir un décor gratuit. On va tout de suite comprendre qu’on n’est pas au St-Denis, ‘mettons. »

À défaut de pouvoir le faire lui-même, Martin Perizzolo a mandaté son bon ami Adib Alkhalidey pour la réalisation de la captation. « On a capté des trucs qui ne sont pas sur scène, qui viennent de l’extérieur. » Perizzolo a écrit un scénario assez léger, et laisse aller Adib pour le reste, en lui faisant pleinement confiance.

La proposition tombait pile-poil pour Adib, qui s’intéresse de plus en plus à ce volet du métier, lui qui réalise depuis peu sa propre série sur LibTV. « Même s’il n’a pas beaucoup d’expérience, je suis convaincu que peu importe ce qu’il touche, ça va être intéressant. Parce que c’est un artiste intéressant. C’est un artiste avant d’être un humoriste. »

Reste à voir s’ils réussiront à s’entendre sur la chemise que portera Martin mardi soir…


 

L’Après-Q

Martin Perizzolo se fait discret sur la suite des choses. Son rôle dans Les Beaux malaises prend de l’importance, et sa présence dans les pubs des Fromages d’ici sera de mise pour encore quelque temps.

En ce qui a trait à un nouveau one-man show, il n’écarte pas l’idée, surtout qu’il teste du nouveau matériel lors de diverses soirées d’humour. « Je vais toujours écrire du standup. C’est un moyen de survie. Mais ce ne sera pas nécessairement pour un one-man show. Je sais pas encore. »   Il aurait d’ailleurs une idée ambtieuse, qui nécessiterait du travail rigoureux et de la recherche, mais deux ou trois autres projets lui trottent aussi en tête. On verra bien ce qu’il adviendra… Mais tout porte à croire que Perizzolo ne disparaîtra pas du radar de sitôt.

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