Suuns

Entrevue avec Suuns | Tension inertielle

Suuns, la formation « drone rock » originaire de Montréal, s’est toujours fait un point d’honneur de faire les choses différemment. Après avoir sorti deux albums produits par l’ami du groupe Jace Lasek, Suuns a cette fois-ci décidé de s’exiler à Dallas pour enregistrer leur troisième album Hold/Still. Sors-tu.ca a partagé un café avec les quatre membres du groupe dans les bureaux de l’étiquette de disque Secret City Records, à quelques jours des spectacles de lancement du 15 avril à l’Anti de Québec et du 20 avril au cabaret La Tulipe, à Montréal.

John Congleton : cet étranger texan

Le producteur John Congleton, qui a déjà travaillé avec une grande variété d’artistes tels que St. Vincent, Swans et Sigur Rós, avait repéré le groupe montréalais alors qu’il donnait un spectacle au Texas.  Quelque temps plus tard, il leur propose de revenir dans l’État de l’étoile solitaire, mais cette fois-ci dans son studio d’enregistrement. En mai 2015, les quatre membres de Suuns – Ben Shemie, Max Henry, Joe Yarmush et Liam O’Neill – se sont donc envolés pour Dallas avec leurs instruments et leurs chansons en poche.

«À bien y penser, c’était plutôt étrange de débarquer aux Etats-Unis pour enregistrer de la musique avec un producteur que nous ne connaissions pratiquement pas», raconte le batteur Liam avec un sourire en coin.

Il faut dire aussi que le groupe n’avait jamais travaillé avec un producteur avant Hold/Still. ‘Mettons qu’ils sont bien tombés! Les musiciens admettent qu’ils ne connaissaient que vaguement le travail de Congleton avant qu’il ne les approche. « Maintenant que nous avons travaillé avec lui et que nous avons pris connaissance de ce qu’il a fait dans le passé, on ne peut que constater que tout ce qu’il touche se transforme en quelque chose d’assez incroyable », nous dit Max Henry.

J’ai compris qu’il nous avait parfaitement jaugé

– Liam O’Neill

Une fois atterris, les quatre musiciens se sont dirigés en voiture vers la banlieue de Dallas pour finalement aboutir devant un vieux cabinet d’avocat à l’allure un peu bizarre. Une fois à l’intérieur, ils n’ont trouvé aucun avocat en cravate, mais à la place, le studio de musique de John Congleton.

« C’était la première fois qu’on le rencontrait et nous avons immédiatement commencé à enregistrer, ce qui est assez intimidant considérant que le musique est quelque chose de plutôt personnel. Nous avons commencé par tracker les instruments et je pouvais entendre les synthétiseurs de Max dans mes écouteurs. Ça sonnait tellement fort et tellement bien. À ce moment-là, j’ai su que ça allait être une expérience incroyable de travailler avec John, qui est aussi un ingénieur de son. J’ai compris qu’il nous avait parfaitement jaugé », explique Liam.

Pendant trois semaines, ils ont donc travaillé sans relâche. Quand la journée se terminait au studio, les garçons passaient à l’épicerie et cuisinaient tous ensemble dans la chaleur accablante de leur petit appartement. Le lendemain, ils reprenaient le travail.

Les premier élans

En 2015, Suuns avait collaboré avec Jerusalem In My Heart, projet passablement expérimental du Montréalais Radwan Ghazi Moumneh, pour composer un album. Depuis, la façon qu’a Suuns d’approcher la musique, et plus précisément d’être en studio, a changé.

« L’album que nous avons fait avec Radwan Mouneh a été fait très rapidement. Les premières idées étaient les meilleures idées. John Congleton a la même approche quand vient le temps de produire un album. Il aime avancer rapidement et garder une bonne cadence. Si une idée ne fonctionne pas, on ne bûche pas dessus; on la laisse tomber et on passe à autre chose», explique Liam O’Neill.

S’il y a une chose que les membres du groupes ont appris au fil du temps, c’est de ne s’acharner sur les chansons et cesser de trop y penser parce qu’elles finissent par stagner et perdre de leur ardeur.

Suuns a l’habitude de tout enregistrer en live. Les interactions et la tension entre les musiciens deviennent alors palpables. Hold/Still est un album spontané et transparent. Il est d’ailleurs plus épuré que les précédents, sans aucun (sinon très peu) d’overdub. Dans plusieurs chansons, il est possible d’entendre clairement quatre instruments, ce qui sonne exactement comme s’ils jouaient live. C’est un album que l’on gagne à écouter plus d’une fois. Et plus on l’écoute, plus on se rapproche de percer le mystère qui l’entoure et plus on l’apprécie dans ses moindres détails.

Ce troisième item à leur discographie est plus dense que les précédents et d’autant mieux ficelé. Selon Liam, ce n’est peut être pas la porte d’entrée idéale pour initier de nouveaux fans à leur musique.

« Je pense que si quelqu’un nous aime déjà, alors il aimera ce troisième album, mais les fans un peu plus passifs ne seront peut-être pas nécessairement aussi fervents. Je n’aime pas le fait que je vienne de dire ça, mais c’est ce que je pense sincèrement.»

On leur a alors demandé quelles seraient les circonstances optimales pour l’écoute de cet album énigmatique et tout en subtilité.

« Je pense qu’idéalement, la meilleure façon d’écouter Hold/Still serait d’être sanglé sur une chaise avec des pinces qui maintiennent les yeux ouverts et d’écouter l’album en boucle pendant trois jours…après ça tu devrais commencer à l’aimer », s’esclaffe Max Henry.

Intense.

« Mais sans rire, peut-être qu’effectivement l’album demande une écoute attentive de prime abord, mais ce n’est quand même pas si weird que ça. Ça demeure de la pop », conclut Liam.

 

Vibe axée sur la tension

Pour ce qui est du son, l’influence techno est assez évidente dans la mesure où le groupe définit sa musique comme étant dictée par la tension.

« Nous avons des règles tacites quant à la manière d’aborder la musique comme par exemple de maintenir la tension et ne pas la laisser s’affaiblir. C’est vraiment une question de vibe, finalement », explique Max.

Le groupe a donc décidé d’explorer les contraires pour parvenir à une sorte de dissonance cognitive pleinement assumée.

«John a un véritable talent pour mixer. Il a un don pour détecter un son intéressant et d’en faire le son le plus fort », explique Liam.

L’album sortira ce vendredi 15 avril. En attendant, Suuns a sorti trois vidéoclips complémentaires dont l’aspect visuel traduit bien l’atmosphère qui règne sur cet album. Le titre de l’album fait d’ailleurs allusion à tout le contenu visuel en lien avec l’album, qui a été réalisé avec une caméra dont le temps d’exposition peut aller jusqu’à 3 minutes, ce qui fait qu’il ne faut pas bouger. Aussi, le chanteur, Ben Shamie, explique que les textes de l’album sont souvent impératifs comme s’il commandait à la foule de faire ou de ne pas faire quelque chose.

Hold/Still. Ne bouge pas, mais écoute!


Dates de tournée

15.04.16 Québec QC @ L’Anti
16.04.16 Carleton QC @ Le Naufrageur
20.04.16 Montréal, QC @ La Tulipe
21.04.16 Ottawa ON @ St Albans Church
22.04.16 Toronto ON @ Adelaide Hall
23.04.16 Athens OH @ Ohio University at Casa Nueva
26.04.16 Philadelphia PA @ Johnny Brenda’s
27.04.16 Washington DC @ DC9
28.04.16 New York NY @ The Marlin Room at Webster Hall
29.04.16 Allston MA @ Great Scott
19.05.16 Berlin DE @ Berghain
20.05.16 Amsterdam NL@ Melkweg
21.05.16 Lille  FR @ Grand Mix
22.05.16 Brussels BE @ La Nuit De Botanique Festival
24.05.16 Londres, UK @ ICA
27.05.16 Neustrelitz, DE@ Immergut Festival
28.05.16 KleinReifling, AT @ Seewiesen Festival
30.05.16 Paris, FR @ La Villette Sonique
01.06.16 Barcelone, ES @ Primavera Sound
03.06.16 Lourmarin FR @ Festival YEAH
04.06.16 Mulhouse FR @ Noumatrouff
05.06.16 Mannheim, DE @ Maifield Derby Festival
07.06.16 Yverdon les Bains CH @ L’Amalgame
08.06.16 Rome, IT @ Monk
09.06.16 Ravenne, IT @ Beaches Brew Festival
17.06.16 Vancouver BC @ Imperial // Levitation Vancouver
25.06.16 Calgary AB @ Sled Island Festival

Vos commentaires