Foxtrott

Entrevue avec Foxtrott | Dans l’antre du renard

Ce soir, au Centre Phi, se tiendra le lancement d’album de Foxtrott, projet bâti de A à Z par la Montréalaise Marie-Hélène L. Delorme.  Elle nous offre officiellement A Taller Us, qu’elle a commencé à créer en 2012 avec son EP à trois titres: Shields, Colors et Head Under Water. Nous avons donc pénétré dans l’antre du renard afin de discuter de son parcours et de son oeuvre, juste à l’aube d’une carrière florissante.

Un rapport physique à la musique

Bien installés dans le fin fond du studio de l’artiste, comme seuls témoins les synthétiseurs et les guitares électriques qui tapissent les murs, Marie-Hélène nous explique que son album aborde des thèmes personnels et introspectifs. Ses influences sont variées. Dans sa jeunesse très influencée par la soul, le dancehall et le reggae, les textures des sons et les percussions prennent donc une place importante lorsqu’elle compose sa musique, bien qu’elle avoue absorber des vibes et des sonorités hétéroclites: « C’est ce que j’aime en musique, c’est de prendre des influences mais de les digérer, de tellement les transformer que tu puisses pas y coller un label. » La création est un élan instinctif chez elle.

A Taller Us, un album complexe et multicouches, témoigne du rapport physique qu’elle entretient avec les sons. Elle nous a d’ailleurs confié posséder un don assez particulier: « Quand je compose je vois des formes dans l’espace. En fait, je peux dessiner les chansons en forme abstraites et je dessine souvent mes chansons avant de les écrire, ça doit être une affaire de fréquence… c’est tellement bizarre à expliquer », s’exclame-t-elle en ricanant.

Foxtrott à MRCY 2014. Photo par Karine Jacques.

Foxtrott à MRCY 2014. Photo par Karine Jacques.

Une voix, une vision

Producer, beatmaker et DJ, elle a voulu changer la donne du milieu électronique, milieu majoritairement masculin. « J’aime tellement la musique électro, mais je trouvais qu’il y avait trop de trucs froids et que les voix féminines sont trop souvent en second plan. On avait besoin de quelque chose qui sort des tripes, tsé… go là, chante criss! », lâche-t-elle spontanément en éclatant de rire.

Delorme s’est souvent fait demandé qui produisait ses beats alors qu’elle fabrique TOUT elle-même. Elle ne s’est pas laissée freiner par les standards d’un milieu très contrôlé par les marketeurs. Un processus qu’elle a trouvé difficile à certains moments en tant que fille, mais rien à faire, elle ne voulait rien savoir de la game. A Taller Us a été produit par nul autre que le célèbre Damian Taylor, réalisateur qui a travaillé sur les albums de Björk. Les normes, les normes, pas une raison pour ne pas être soi-même.

« C’est difficile de se placer dans l’industrie quand tu rentres pas dans les cases, mais en même temps… je sais que le monde qui travaillent avec moi, c’est parce qu’ils aiment ma musique, sincèrement. »

Pas de doute, les voix qui peuvent être considérées comme des afterthoughts en musique électro, sont au premier plan dans le projet Foxtrott. Elle prend d’ailleurs la peine lors de ses concerts, de faire venir des musiciens pour ajouter de la chaleur à ses prestations, aussi afin de lui permettre de livrer des performances vocales puissantes et complètes.

 

L’électro… ?

C’est normal de vouloir catégoriser la musique mais peut-être qu’au Québec, on fait entrer pas mal de choses dans la catégorie de l’électro. Est-ce qu’on pourrait dire que Tiga, c’est de l’électro au même titre que Foxtrott? Sans doute pas.

« Le monde qui vient voir ce que je fais s’attend souvent à arriver dans un dance party… mais moi j’écris des chansons… L’électro, ça veut pu  vraiment rien dire en 2015″, enchaîne Foxtrott.

MRCY 2014. Photo par Karine Jacques.

Les catégories sont beaucoup plus fluides qu’avant, il y a tellement de sous-branches, c’est une erreur de tout ramener aux machines. Il y a du travail et de la création là-dedans. La technologie offre une liberté musicale incroyable, ayant pour seule limite sa propre tête. Les claviers ont permis une démocratisation de la musique, ils sont un apport à l’industrie selon Marie-Hélène, qui use de divers instruments pour créer sa musique, notamment des percussions et du cor français.

Marie-Hélène L. Delorme a fait grandir sa musique, qui l’a faite grandir à son tour. L’authenticité et le génie de cette fille la feront certainement connaître aux quatre coins du monde.

Pssst. Elle est avide de bonne bouffe, vous pourrez peut-être croiser Foxtrott dans les restos branchés du Chinatown…

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