Festival de jazz de Montréal – Jour 9 | Badbadnotgood, Ghostface Killah et le fantôme d’Amy Winehouse

Pour l’avant-dernière soirée du Festival de jazz de Montréal, notre itinéraire comportait une projection de documentaire et un show hip-hop. Vivement la variété.

À chaque dévoilement de la programmation du Festival de jazz, on ne peut s’empêcher d’imaginer ce qu’aurait provoqué une présence d’Amy Winehouse sur l’une des grandes scènes montréalaises dans le cadre du festival. La jeune dame représentait si bien ce que le jazz pouvait donner sous une forme moderne, en plus d’intéresser la génération Y à cette forme musicale souvent un peu hermétique. Sans trop le savoir, elle portait un peu le proverbial flambeau.

Amy jouissait d’une voix digne des grandes du jazz, d’un talent indéniable pour les compositions soul, et rassemblait tout ce qu’il fallait pour faire parler d’elle à l’ère des réseaux sociaux : les frasques, les tatouages, une beauté atypique, un caractère bouillant et un franc-parler rafraîchissant. Genre Kim Kardashian avec du talent (donc pas du tout Kim Kardashian).

Mais voilà, elle avait elle-même pour principal obstacle, et écrasée par une célébrité malsaine, elle s’est achevée à coup d’injections d’héro, de whiskey-coke et de doigts au fond de la gorge. Fin abrupte (mais prévisible) à l’âge de 27 ans, bien sur, rejoignant ainsi (sans doute accidentellement) Kurt, Janis, Jim et Jimmy dans le lugubre « 27 club ».

Ça tombe donc sous le sens que le documentaire d’Asif Kapadia, qui porte sur la chanteuse au noir destin, soit présenté en grande première dans le cadre du Festival de jazz, une semaine avant sa sortie étendue. Elle a joué au FIJM en 2004, et serait sans doute revenue si son sort avait tourné autrement.

Rien de très nouveau dans ce documentaire, puisque on connaît tous un peu l’histoire, bien documentée par les paparazzis et médias à potins, et que seulement quatre années nous séparent du jour fatidique.

Mais il y a tout de même quelque chose de marquant et d’important dans le fait de raconter cette déchéance par le biais d’images inédites et souvent très personnelles, et d’extraits audio de la principale intéressée et de ses proches, particulièrement pour tout ce troublant pan de l’histoire qui concerne son conjoint (et éventuel mari) Blake Fielder Civil. Leur idylle aura marqué le début de la fin.

Il y a quelque chose de déchirant à la voir si heureuse et pleine de vie, à peine quelques années plus tôt, et de constater, en condensé, l’effet poison de sa notoriété. Ni glorifiée, ni lapidée, Amy a le mérite de raconter son histoire par le biais de divers points de vue pertinents.

Amy prend l’affiche le 10 juillet.

 

Badbadnotgood avec Ghostface Killah

À l’autre bout du Quartier des spectacles, le Métropolis était bondé pour le passage de Dennis Coles, mieux connu sous le sobriquet de Ghostface Killah, accompagné du trio jazz torontois Badbadnotgood.

Fraîchement débarqué d’un vol épuisant de plus de 20 heures – il était en tournée en Europe avec le Wu Tang Clan – Ghostface souffrait visiblement des effets du décalage horaire. Et il ne s’en cachait pas.

Qu’à cela ne tienne, la clémence de la foule était totale, et personne n’allait se plaindre d’entendre des hits marquants du hip-hop avec l’accompagnement musical de BBNG, ne serait-ce que pour un maigre 60 minutes.

Bien qu’ils aient fait paraître un album hautement pertinent il y a à peine quelques mois, l’excellent Sour Soul, ce n’était pas vraiment de cela qu’il s’agissait.

Badbadnotgood a d’abord mis la table avec quatre pièces instrumentales en guise d’introduction, dont un nouveau morceau inédit (au titre de travail 4 Shots) et une reprise de Putty Boy Strut de Flying Lotus. S’ensuit l’inévitable « Faites du bruiiiiiiit » et l’arrivée du rappeur quarantenaire. Et les hits n’ont pas tardé : The World Is Yours de Nas, Shimmy Shimmy Ya d’Old Dirty Bastard, et Wu-Tang Clan Ain’t Nuthing ta Fuck Wit, notamment.

Ghostface a même invité quelques fans à monter sur scène afin de l’accompagner sur Protect Ya Neck, tiré du tout premier album de Wu TangL’un des trois gars qui a osé grimpé sur scène s’est d’ailleurs très bien débrouillé en interprétant un des couplets. Pas pire.

Évidemment, Ghostface n’est pas connu pour ses grands talents de chanteur, et il a massacré au passage quelques notes de chant notamment du classique I Want You Back des Jackson 5, mais lorsqu’il rappe, ça rentre au poste.

Le concert a semblé être interrompu plus tôt que prévu, sans rappel, sans doute parce que Ghostface ne tenait plus debout. N’empêche, un sapré bon moment.

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