FME 2017 | 3 lancements d’albums vus de l’intérieur avec Pierre Kwenders, Jason Bajada et Laura Sauvage

C’est au nord du 48e parallèle que s’est achevée en beauté la 15e édition du Festival de Musique Émergente en Abitibi-Témiscamingue. Voilà un autre rendez-vous qui aura réussi à sortir les festivaliers des sentiers battus et à mettre en lumière des artistes de la relève. Plusieurs d’entre eux en ont même profité pour lancer leurs nouveaux-nés en exclusivité.  Belle occasion pour aller à leur rencontre afin de leur tirer les vers du nez et assister à des prestations uniques dans un contexte épique.

Pierre Kwenders // MAKANDA At the End of Space The Beginning of Time


Makanda signifie la force en tshiluba, langue congolaise, et se réfère à un hommage rendu aux trois femmes de la vie de l’artiste, soit sa mère, sa tante et sa grand-mère qui ont été des exemples de persévérance, de détermination, d’amour et de joie de vivre dans la vie de Pierre Kwenders. À cette jolie considération s’ajoute une philosophie : « La vibe de l’album en soi c’est comme si on planait entre le temps et l’espace, qu’on se laissait aller dans la boucle de la répétition des événements sans se préoccuper du temps »

Au centre de cet album, une thématique récurrente émane de ses histoires d’amour :

« Dans La La Love se retrouve l’idée d’un amour pas nécessairement bon mais qu’on ne veut pas laisser partir. Et Sexus Plexus Nexus c’est un amour charnel et intense qui nous pousse à vouloir dépasser nos limites. Dans l’amour il y a quelque chose de beau mais il faut garder ça simple et de bonne humeur. »

L’album est parsemé de paroles issues de lingala, du tshiluba, du français et de l’anglais. Habile, Pierre Kwenders s’inspire du ressenti dégagé par les particularités langagières pour s’exprimer en fonction des spécificités sonores qu’elles génèrent : « Ce jeu de changement de langue complète bien l’émotion que j’ai envie que les gens ressentent en écoutant ces chansons-là. »

Photo par Christian Leduc.

Photo par Christian Leduc.

La plupart des compositions qui apparaissent sur son album s’avère le résultat de collaborations avec d’autres artistes, motivation issue entre autres d’un désir altruiste de partager son art :

« On collabore pour être challengé. Dans la pièce Faut pas se fier aux apparences j’ai collaboré avec Yann Perreau et ça m’a sorti de ma zone de confort. L’important c’est que chacun y trouve son compte. Je veux apprendre de l’autre et que l’autre apprenne de moi. »

Le lancement officiel de l’album aura lieu le 13 septembre prochain au Centre PHI dans le cadre de POP Montréal.

 

Jason Bajada // LOVESHIT II (Blondie & The Backstabberz)


Jason Bajada nous offre un double album bien assumé malgré ceux qui redoutaient que le public le reçoive comme une épine au cerveau aujourd’hui réputé pour être incapable de s’intéresser plus qu’une minute à quoi que ce soit (see what I did there?).

Photo par Dominic McGraw.

Photo par Dominic McGraw.

Et pourtant, c’est un 75 minutes bien investi, un double album riche et varié qui réunit vingt pièces qui oscillent tantôt entre le folk à la Elliot Smith qu’on lui connaît si solide et fignolé avec grand soin (Final Breath), le rock fluide et entraînant à la The Cure (Painkiller) et les rythmes ludiques et gentils de Joe Dassin (Little Yellow). Mais, prière de rendre à César ce qui appartient à César, Jason Bajada c’est du Bajada, une inspiration en tant que tel tant par la richesse de sa musicalité que par les textes incisifs, tous relatant les hauts et les bas de ses délires amoureux et des drames personnels qui l’ont plongé dans le noir et lui ont quasiment coûté la vie.

Même si les paroles auraient le pouvoir de nous faire sombrer au fond du trou, la musique qui les accompagnent annule l’effet dramatique et rend même le tout très sympathique. C’est même tentant d’en rigoler tellement les sonorités et les rythmes combattent la grossièreté du texte :

« You sucked the best out of me. You left me confused as fuck »

« I just don’t understand why you poisoned the love we had »

Portant un regard sur lui-même, l’auteur-compositeur-interprète admet qu’il est dépassé par les événements qui alimentent son existence : « J’ai besoin d’effacer ce passé qui m’a complètement décimé […] ». Comme un vecteur de créativité, il se rend à l’évidence : « Je suis tanné [des histoires d’amour dramatiques], tu le vis et c’est intense, naturellement tu vas faire de l’art avec ça. ». Bien qu’on lui souhaite que du bonheur, il faut quand même admettre que le junkie des histoires d’amour impossibles qui vit en lui a le mérite de générer des chefs d’œuvre musicaux.

Les critiques à l’égard de ce 6e album sont élogieuses et bien méritées. À voir absolument en prestation live, sa passion émane sur scène et si vous avez autant de chance que nous au FME, Philippe Brault, le réalisateur et arrangeur de son dernier album sera peut-être de la partie, basse en main.

Le lancement officiel (et gratuit) aura lieu le 7 septembre à Montréal au Théâtre Fairmount.

 

Laura Sauvage // The Beautiful


L’énergique Vivianne Roy propose un deuxième album qui relâche toute la pression du presto encastré dans la tête du personnage de Laura Sauvage. La proposition a du caractère et les idées concentrées dans ses paroles sortent tout droit d’un nouveau monde. Catapultés à bord d’une soucoupe, on assiste aux fois où sa mère et sa grand-mère ont aperçu des ovnis. Très lucide, Vivianne ose elle-même y croire :

« I want to believe. Quand on y pense on est tous des aliens. Si on pense qu’on est les seuls dans l’univers on est selfish. J’ai confiance en ma mère et ma grand-mère. Ce sont des femmes rationnelles, je les crois sur parole. »

Membre du groupe Les Hay Babies, elle mène son projet parallèle à partir de Montréal où elle habite dorénavant : « Les Hay Babies, c’est ça ma priorité mais quand c’est pas booké, on fait jouer Laura Sauvage. »

Photo par Christian Leduc.

Photo par Christian Leduc.

La terrasse du Pub Chez Gibb était rempli samedi après-midi. Apparemment prise d’un coup de nervosité, on y a vu que du feu ; la performance était tout à fait à la hauteur de son panache. L’aplomb total viendra avec le temps mais pour l’instant, l’idée anyway c’est de s’amuser : « C’est un projet l’fun qui m’occupe et qui permet de me relâcher. C’est vraiment juste du word vomit. »

laura-sauvage-pochetteMalgré ce qu’elle ose en dire, la proposition a du front tout le tour de la tête. C’est un album qui déborde de sens, d’ailleurs, l’idée derrière son titre The Beautiful relève d’une critique personnelle : « J’voulais faire référence à la campagne électorale aux États-Unis. L’attitude de Donald Trump me faisait penser à l’hymne patriotique américain America The Beautiful. » Quant à la pochette, elle sort tout droit des Années 60 : « Les culottes avec la couronne c’est Donald Trump. Les bas ce sont des aliens, les pants en arrière, c’est tout le monde qui watch le Président par le back ».

Voilà, vous savez presque tout de chez Tout ! Le lancement officiel de l’album aura lieu le 6 septembre à l’Apartment 200, à 17h.

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