Orchestre Métropolitain

L’Orchestre Métropolitain et Keri-Lynn Wilson | Brillant Tchaïkovsky

À quoi ressemble l’Orchestre Métropolitain lorsqu’il ne partage pas la scène avec son directeur artistique et chef d’orchestre attitré? Dirigé avec brio par la cheffe invitée Keri-Lynn Wilson et accompagné par le pianiste Zhan Hong Xiao, il a apporté à la musique de Tchaïkovski ses lettres de noblesse et a régalé une nouvelle fois le public de la Maison Symphonique.

 

Sincérité du Concerto

Après quelques mots en français où elle promet au public de « réchauffer les cœurs avec la belle musique de Tchaïkovski », Keri-Lynn Wilson accueille sur scène le jeune pianiste cino-québécois Zhan Hong Xiao, notamment vainqueur de l’émission Virtuoses en 2017. Alors que les musiciens entament le Concerto pour piano n.1 en si bémol mineur (op. 23), on ressent une certaine anxiété de la part du soliste. Les premières notes de piano sont un peu faibles, mais Zhan Hong Xiao retrouve rapidement sa concentration, notamment grâce à l’attention de la cheffe et de l’orchestre à son égard.

Keri-Lynn Wilson regarde autant le pianiste que l’orchestre. Une belle forme de bienveillance entoure Zhan Hong Xiao : le concerto nécessite une synchronisation parfaite de l’orchestre et du soliste, car les jeux de questions-réponses sont omniprésents et les accents rythmiques sont communs à tous les instruments. Et on sent assez rapidement que l’orchestre s’appuie sur sa connaissance de la partition pour aider le jeune pianiste, en ne se formalisant pas des départs parfois un peu précipités et en laissant les solos prendre de l’ampleur ou s’accélérer au besoin. La cheffe d’orchestre, très réactive, veille à caler tous ses tempi sur ceux du pianiste, qui lui rend la pareille dans un jeu de regards surprenant.

Zhan Hong Xiao retrouve sa sérénité au fil du concerto, et il nous offre une interprétation très délicate de ce hit de la musique classique. Sa concentration laisse la place à une belle sincérité dans le jeu : l’émotion transparaît sur son visage . Le concerto est parfois un peu timide et il y a quelques erreurs de texte, mais la complicité entre le pianiste, la cheffe et l’orchestre est si belle qu’on en oublie le reste. Le concerto se termine sur un tutti brillant et un grand sourire collectif.

* Photo par François Goupil.

Puissance de la Symphonie

C’est après l’entracte que la direction de Keri-Lynn Wilson s’exprime le mieux. La cheffe dirige par cœur la Symphonie n.5 en mi mineur (op. 64) de Tchaïkovski. Celle-ci est caractérisée par une puissance tragique, un fatum qu’exprime à merveille l’orchestration du compositeur. Keri-Lynn Wilson entame la symphonie avec recueillement devant un superbe thème des clarinettes. Particulièrement attentive aux cuivres de l’orchestre, elle vit la partition et danse sur l’estrade. Une direction qui rappelle celle de Nézet-Séguin, à laquelle l’orchestre est habitué. Mais Wilson se démarque par une force et un dynamisme impressionnants. Tandis que sa main droite conserve un tempo constant – qui convient très bien à une œuvre aussi tonitruante – elle se sert de la gauche pour préciser chaque intonation, chaque thème.

Les mouvements sont interprétés de manières assez distinctes : le premier monte progressivement en puissance, tandis que le second laisse place à un lyrisme quasiment douloureux. L’orchestre fait honneur à la pièce grâce à des entrées vives et contrastées. Alors que le troisième mouvement, beaucoup plus léger, redonne de la lumière à une symphonique parfois écrasante, le quatrième, entamé avec la même intensité que le premier, se termine sur une puissance à la fois vivace et épuisante.

La dernière note, si intense, fait place à un silence que le public s’empresse de combler en bondissant de son siège avant même que Keri-Lynn Wilson ne se tourne vers la salle. La cheffe invitée prendra le temps de remercier chaque soliste et chaque pupitre d’instrument, avant de saluer elle-même après cette superbe performance. L’alchimie entre les musiciens de l’Orchestre Métropolitain et Keri-Lynn Wilson était certes différente de celle qui les lie à leur directeur artistique, mais elle n’en était pas moins belle.

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