Orchestre Symphonique de Montréal

Montréal en lumière 2016 | Le grand retour de Charles Dutoit à l’OSM

Dire que le grand retour, après 14 ans, de Charles Dutoit avec l’OSM jeudi soir à la Maison symphonique a été triomphal, déjà le mot n’est pas assez fort.

Dans sa courte présentation, Alain Simard, producteur de Spectra Musique et cofondateur de Montréal en lumière, qui a été selon ses propres mots «la bougie d’allumage» pour la concrétisation de ce concert, a parlé de rien de moins que d’une «soirée historique». Et ce fut le cas.

Charles Dutoit, d’origine suisse, a dirigé l’OSM pendant 24 ans. Un orchestre qu’il a élevé au rang des meilleurs au monde, en n’ayant de cesse de réclamer une nouvelle salle à Montréal qui soit véritablement de calibre symphonique. Il y était enfin, comme en cadeau pour ses 80 ans.

Difficile de ne pas vénérer un homme de cette stature, qui a travaillé dans les 196 pays du monde. En 1982 seulement, il a dirigé durant la même saison les cinq plus grands orchestres américains, soit New York, Chicago, Boston, Cleveland et Philadelphie. Au Carnegie Hall de New York, il a dirigé à 62 reprises avec sa courte baguette blanche. Dutoit, c’est également plus de 200 disques sur des étiquettes aussi prestigieuses que Deutsche Gramophone, EMI ou Erato. Des enregistrements qui lui ont mérité 64 prix internationaux, dont deux Grammy Awards.

Jeudi, tout juste précédé de son premier violon, Richard Roberts, le grand Charles a fait son entrée sous un tonnerre d’applaudissements. Il a salué, sans parler, puis est rapidement monté sur le podium du chef d’orchestre, redingote en queue de pie de circonstance, et a entamé l’Ouverture de Le Carnaval romain d’Hector Berlioz. Le compositeur français du XIXe siècle, qui a aussi été écrivain, aimait les emportements de l’orchestre, les crescendos violents suivis d’accalmies empreintes de douceur.

Photo par Victor Diaz Lamich.

Photo par Victor Diaz Lamich.

Martha Argerich au piano

Mais Berlioz était servi en apéro (moins de 10 minutes). Une pause ensuite fut nécessaire pour les déplacements des musiciens, et surtout pour l’entrée au-devant de la scène du piano Steinway de Martha Argerich, pianiste invitée d’origine argentine qui allait jouer l’intégrale du Concerto pour piano no 1 de Ludwig van Beethoven. La grande Argerich, qui connaît elle aussi une histoire d’amour avec Montréal, a été très chaudement accueillie.

Plus tout à fait jeune, cheveux longs davantage sel que poivre, robe longue en tissu léger noir comme son piano et les habits des musiciens, elle s’est délié les doigts sur les cuisses et a pris une grande respiration en reculant la tête avant de plonger avec le premier mouvement du concerto de Beethoven. Et elle se dandinait légèrement sur son banc entre deux rafales de notes.

Son piano est limpide, et juste assez énergique pour atteindre le ravissement chez les mélomanes venus l’entendre dans cette salle dont l’acoustique est tout simplement parfaite. Une salle à échelle humaine, où l’on entend bien de partout. D’autant que, comme hier où il n’y avait pas de chœur, le public était assis sur les quatre côtés, comme pour mieux envelopper les musiciens.

Avec agilité, Martha Argerich, qui s’est mise au piano à l’âge de cinq ans, a ensuite exécuté le deuxième mouvement comme en laissant ruisseler une eau cristalline. Et elle a enchaîné prestement avec le troisième mouvement du concerto, le plus mélodieux des trois, soutenue par quelque 25 violons, six violoncelles et quatre contrebasses, entre autres instruments. Elle en a récolté une longue ovation debout, revenant saluer à quatre reprises, avant d’offrir un court rappel, seule au piano.

Au retour de l’entracte, c’est la version originale de 1911 de Pétrouchka d’Igor Stravinsky qui nous attendait. Deux harpistes se sont ajoutés à l’orchestre que Dutoit a dirigé avec la fougue obligée par l’oeuvre. Chez Stravinsky, on retrouve souvent la plus grande discorde mélodique, comme si les instruments se livraient un combat à finir. Néanmoins, Pétrouchka se termine tout en douceur.

Suivait La Valse de Maurice Ravel, comme une vague chantante, mais non sans fracas inattendus. Même dans une valse, Ravel savait se montrer austère quand il s’y mettait. La finale, avec la puissance de tout l’orchestre, fut grandiose. À peine la dernière note lancée, le public était debout, applaudissant à tout rompre. Après être revenu saluer tant et tant, un rappel était inévitable. Charles Dutoit avait en réserve dans sa manche un extrait du Boléro de Ravel, dont l’intégrale d’ailleurs a déjà été endisquée par le maestro avec l’OSM, pour en faire une des, sinon la meilleure version existante.

Le concert de jeudi à la Maison symphonique sera offert à nouveau demain ce samedi 20 février, mais il affiche complet depuis un bon moment. Par contre, il a été enregistré par ICI Musique qui le diffusera le 22 février à 20h00, dans le cadre des Soirées classiques. Et on peut également avoir accès à une captation vidéo sur le net à medici.tv, ou encore à ICIMusique.ca.

 

 

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