Nikamu Mamuitun - Chansons rassembleuses

Nikamu Mamuitun – Chansons rassembleuses | Un modèle idéal de création métissée

Imaginez un projet où de jeunes artistes québécois et autochtones échangeraient, apprendraient à s’apprivoiser, et créeraient ensemble, en pigeant à la fois dans la langue française et la langue innue. En fait, pas besoin de l’imaginer puisqu’il existe : ça s’intitule Nikamu Mamuitun – Chansons rassembleuses, et le spectacle qui en découle sera présenté à la Cinquième Salle de la Place des Arts, le vendredi 26 octobre prochain.

L’idée est venue en rêve à Alan Côté, directeur général et artistique du Village en chanson de Petite-Vallée, et initiateur du projet Nikamu Mamuitun. « Il y avait des possibilités pour monter des projets pour le 150e anniversaire du Canada, nous raconte-t-il au bout du fil. À deux semaines du deadline, je rêve que Florent Vollant vient me voir et me dise : « Alan, trouve-moi les meilleurs poètes pour traduire en français ce qu’on dit en innu dans nos chansons. » Tout de suite, je me réveille et j’échafaude un projet complexe avec des résidences croisés à Maliotenam et à Petite-Vallée. Et quand j’en ai parlé à Florent, il m’a dit que le projet lui semblait pertinent, mais qu’il serait important que les artistes québécois chantent aussi en innu, pour magnifier cette langue qui est en train de disparaître. »

De fil en aiguille, le projet prendra forme. Les huit jeunes artistes à qui on a finalement fait appel sont Matiu, Karen Pinette-Fontaine, Scott Pien-Picard, Ivan Boivin, Marcie, Cédrik St-Onge, Chloé Lacasse et Joëlle Saint-Pierre. Guidés et soutenus par les mentors du projet, soit Florent Vollant, Marc Déry, Réjean Bouchard et Guillaume Arsenault, les auteurs-compositeurs-interprètes étaient appelés à se côtoyer lors de résidences d’artistes et d’accoucher de compositions musicales dans un esprit du métissage culturel.

« Moi, ce que je souhaitais, c’était de l’ouverture, souligne Alan Côté. Ce dont je suis le plus fier, c’est de mettre la table pour qu’il se passe des affaires. C’est d’organiser l’organique. On met la table, et il se passe des trucs. »

Réapprendre sa langue

Pour Karen Pinette-Fontaine, le projet revêt un cachet encore plus particulier. Techniquement, la jeune femme de 19 ans fait partie des artistes autochtones du projet. Mais sa langue, elle ne la parlait plus.

« Ça a été comme une crise identitaire. On dirait qu’il y a quelque chose qui s’est allumé, nous explique-t-elle au sujet du processus de ré-apprentissage de la langue innue. J’essaie de me mettre dans la peau des gens de mon âge. Parfois, ils ne veulent pas parler de leur culture, de leurs origines parce qu’ils sont gênés. Je pense que c’est important pour eux d’en parler pour faire grandir leur confiance, leur fierté de qui on est. J’ai essayé de le faire d’une façon artistique, et finalement, j’étais fière de montrer la langue innue au public. Fière de la réapprendre aussi, pour moi-même. » 

Son rapport aux artistes allochtones l’a également réjouie. « Les artistes québécois étaient vraiment intéressés et ouverts aux idées, au principe d’intégrer l’innu dans les chansons. C’était aussi intéressant de parler un peu des réalités, de la culture, des traditions. J’ai beaucoup remarqué ça, leur ouverture, leur curiosité. »

Joëlle Saint-Pierre abonde en ce sens. « Ce show-là est vraiment à propos de la rencontre. C’est fou comment on n’avait pas de bonne raison de ne pas se connaître. On a tellement de fun sur scène, les gens vont se rendre compte qu’on s’aime et qu’on a beaucoup appris en travaillant ensemble. J’espère qu’ils vont se dire : « moi aussi, j’ai le goût d’avoir ça dans ma vie. » »

Pour sa part, Marcie se réjouit d’avoir pu faire la rencontre de ces artistes qui étaient là, tout près, sans qu’on les remarque. « Je trouve qu’on est rendu une gang. C’est fou de penser qu’ils étaient là, juste à côté, et qu’on ne les a jamais côtoyés avant. Les réseaux musicaux ne nous permettent pas de se rencontrer. Pourtant, Ivan et Scott font de la tournée, ils sont toujours en shows dans le Nord. Jamais cette rencontre-là a été possible avant cet événement-là. »

Écrire ensemble, ça nous permettait d’échanger sur la création, et sur les traditions aussi, sur nos réalités. L’écriture de la chanson a été un prétexte pour des échanges qui dépassaient la musique.
– Marcie 

Nikamu Mamuitun – Chansons rassembleuses a été créé et présenté lors du Festival en chanson de Petite-Vallée à l’été 2017, puis au Festival Innu Nikamu de Maliotenam. Un projet d’album est également en chantier.

Pour tous les détails et les billets pour le spectacle du 26 octobre à la Cinquième Salle de la Place des Arts, rendez-vous par ici.

Consultez également le balado à ce sujet, produit par la Place des Arts avec la collaboration de Culture Cible :


* Cet article a été produit en collaboration avec la Place des Arts. 

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