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Semaine Heavy Montréal | La métalleuse insoupçonnée en Isabelle Longnus

En cette semaine de Heavy Montréal, on constate que le festival ne suscite pas seulement l’intérêt des grands dudes aux cheveux longs et aux fripes noirs. Tout âge, tout genre, il y a un « pouèle » caché en bien des gens, un passé teinté de nostalgie heavy métal ou une passion secrète pour la musique qui déménage. Tout au long de la semaine, Sors-tu.ca en déterre quelques-uns… ils sont partout, parmi nous : des métalleux insoupçonnés. Troisième d’une série de quatre : l’auteure compositrice interprète Isabelle Longnus.

 

« Tu savais qu’elle a déjà eu son propre band speed métal ? », nous chuchotait Arnaud Nobile, le grand manitou d’Atuvu.ca au sujet d’Isabelle Longnus, alors qu’elle se produisait sur scène lors d’un 5 à 7 sur le site de Juste pour rire, récemment.

Vraiment ?  Speed metal ?

Aujourd’hui, elle propose plutôt de la chanson appliquée, aux textes soignés, aux arrangements doux. Il est vrai que sur scène, elle se déchaîne un peu plus.

Mais quand même. Speed metal ?

Encore mieux : le nom du band était inspiré de son nom… et elle s’était fait viré du groupe qui portait son nom. Là, on tient quelque chose.

Rejointe au téléphone alors qu’elle rentrait à Montréal après avoir tourné en Acadie et à Québec, Isabelle Longnus acquiesce. « Ça s’appelait Méchante Longnus ».

Pourtant, rien ne laissait présager que cette douce Marseillaise maintenant installée au Canada puisse avoir un passé, voire même un présent de métalleuse. Et pourtant, c’est bien le cas. « J’étais une gentille jeune fille de bonne famille, qui étudiait le théâtre classique. J’apprenais Racine et Corneille, je vivais dans une bulle. Mon entourage écoutait pas ça du tout : c’était de la bonne chanson, ou au pire, du new wave. Ma mère écoutait Brassens ».

Pourtant les hasards de la vie l’ont rapidement menée à se fasciner pour le punk rock. « Ça a changé ma vie. Mon premier concert, j’avais 14 ans, c’était Nina Hagen sous un chapiteau à Marseille. J’y suis allée avec ma mère, parce que je n’étais pas majeure. Ça a été le choc de ma vie, et celui de ma mère aussi, elle s’en rappelle encore. C’était très violent pour moi à l’époque. Et encore longtemps après ».

Tout naturellement, le punk l’a menée au métal. Sa fascination pour l’Allemande Nina Hagen l’a conduite vers d’autres artistes de la même nation.

« J’avais un copain qui écoutait des trucs pétés. J’ai découvert des groupes comme Oomph, ça fait 25 ans que ça existe. Ils avaient un super beau chanteur qui s’appelait Dero, je me rappelle encore.  J’aimais le théâtre qui allait avec. »

« J’aimais les bands comme ça, allemands ou suédois. Les groupes français qui faisaient du métal, ça le faisait pas.  Puis, je suis allé dans les classiques : Ozzy Osbourne, Black Sabbath, Alice Cooper. »

Il y a une agressivité qui est évacuée. Parce que c’est de l’imaginaire, du fantasme. C’est fantasmagorique, c’est comme regarder un film d’horreur. On embrasse le fantasme, tout en restant les pieds sur terre.

Méchante Longnus

Au départ, ce n’était pas tant la musique que la philosophie, le look et le style de vie qui l’attiraient. « J’avais la mini-jupe, les bottes en cuir, le soutien-gorge, les morceaux de métal un peu partout, j’avais le look quoi. Et j’aimais la liberté, de dire ce que tu veux, d’agir différemment ».

En tant que musicienne, ça a commencé auprès de Ray Condo, qui faisait dans le rockabilly, ici à Montréal. « Ça m’a donné la piqure, mais je trouvais ça un peu mou. » Elle a ensuite rencontré des musiciens, qui cherchaient une chanteuse pour un « groupe rock un peu heavy ».  « Quand je suis allé les voir, Ils m’ont trouvée sympathique et mignonne. Je me suis mise à gueuler dans le micro, ils aimaient ça. Je me suis mise à monter des chansons, puis j’ai viré le guitariste qui m’avait engagée. (rires) »

isabelle-longnus

Époque Méchante Longnus (1995)

Méchante Longnus était né, et donnait des spectacles un peu partout en ville. Isabelle Longnus se rappelle notamment avoir donné un spectacle dans un bar de sous-sol au coin de St-Laurent et de Sherbrooke, devant notamment… sa mère. « Elle est venue, ma mère c’est ma meilleure fan. Je lui ai demandé : ‘Ça t’a plu?’. Elle m’a répondu que c’était un peu agressif. (rires) On a tenu comme ça un certain temps. Pour moi, c’était synonyme de défonce. C’est le lifestyle que j’aimais. Je disais « Fuck you » à toutes les 5 secondes.  »

« J’étais un peu dark, mais c’est ça le métal : aller chercher les symboliques, la mort, le démon, tout ça. Mais pour moi, il fallait qu’il y ait du propos. Ça ne marchait plus parce que les gars trouvaient qu’avec ces textes, je ne pouvais plus chanter aussi vite que d’habitude. Le plus dur, en tant que musicien, c’est de trouver son son. J’étais encore trop jeune pour le comprendre. »

 

Montréal : ville du vice

Pour elle, qui a vécu en France, à Vancouver et dans d’autres villes, Montréal est l’endroit où cette personnalité de métalleuse s’éclate. « Quand j’ai quitté Montréal, j’ai quitté tout ça. Il fallait que je me calme, je sais pas si j’aurais pu survivre. J’ai tout calmé. Mais quand je reviens à Montréal, on dirait que ça revient en moi. Montréal, ça me rappelle tous mes vieux souvenirs. Et c’est toujours un peu ça, dans la vie : ce que l’on cherche adulte, c’est retrouver les parfums, les joies de quand on était jeune. J’ai toujours dit : métalleux un jour, métalleux toujours. »

Elle ne tarit d’ailleurs pas d’éloges envers la faune métalleuse, qu’elle considère comme une « communauté très respectueuse ». « Dans tous les concerts où je suis allée, j’étais toujours en mini-jupe, les nichons à l’air, pétasse comme tu peux pas imaginer. On m’a jamais mis la main au cul. Chez les métalleux, il y a une espère de compréhension de pourquoi on est là. Moi je me dis que les gens qui font du métal ne sont certainement pas plus agressifs qu’un Claude Dubois, par exemple, qui se bourre la gueule et conduit en état d’ébriété. Il y a une agressivité qui est évacuée (quand tu écoutes du métal). Parce que c’est de l’imaginaire, du fantasme. C’est fantasmagorique, c’est comme regarder un film d’horreur. On embrasse le fantasme, tout en restant les pieds sur terre. »

* L’album Code Bleu d’Isabelle Longnus est en nomination au West Coast Music Awards pour Album francophone de l’année. Elle sera en spectacle le 14 août au Festival Rhytmes et Courant à Lavaltrie, le 16 octobre à Sherbooke, le 12 novembre à la Chasse-Galerie de Lavaltrie. D’autres dates seront annoncées pour Montréal prochainement.


Les 6 artistes métal incontournables d’Isabelle Longnus

  • Black Sabbath : « un classique pour moi. Paranoid, je ne me lasse pas ».
  • Judas Priest : « Un autre classique pour moi, et à cause de Rob Halford ».
  • Megadeth : « à cause de Dave Mustaine ».
  • Oomph : « pour Dero ! Je n’aime pas tout, mais je les connais depuis trop longtemps pour ne pas les mettre dans mon palmarès ».
  • Slipknot : « son contemporain et image forte ».
  • White Zombie : « quand je fais mon ménage ».

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